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Un Rédacteur Factornews vous demande :

INTERVIEW

Johan Vinet

Zaza le Nounours & billou95 par Zaza le Nounours & billou95,  email
Niveau timing du développement, tu as commencé en 2019 ; en 2020, la pandémie, le confinement :  ça a changé quelque chose pour toi ou au contraire, en tant que développeur seul, tu n'as rien vu passer et c'était peut-être le meilleur moment pour être dans un développement de jeu en solo et ça ne t'a donc pas perturbé plus que ça ?

Ça a été bizarre parce que quand la pandémie est arrivée, tout le monde s’est retrouvé à bosser de chez soi, j'étais là, “ah ben moi, ça fait longtemps que je travaille comme ça, bienvenue”. Après, comme j'avais été indépendant freelance pendant longtemps, déjà en France, et que j'avais toujours beaucoup travaillé chez moi, tout seul, ça n’a pas changé grand chose la pandémie. Par contre j'ai deux petites filles qui à l'époque étaient en garderie et début d'école primaire, et se sont retrouvées à la maison du jour au lendemain. Ici ça a pas niaisé, les écoles ont été fermées de mars jusqu'à la fin de l'été, donc j'ai pas pu bosser, tout simplement, ça a été un enfer complet. Avec ma femme qui travaille aussi de la maison, on a cru au début qu'on pourrait s'organiser, on a fait comme tout le monde, là on s'est passé les agendas “tu gères les Skype ou les Teams le matin, l'après-midi c'est moi”, ensuite il y en a qui s'occupe des enfants, l’après midi, c'est l'autre… En une semaine ça a été l’orgie à la maison, on ne s'en sortait plus donc j'ai pris la décision de ne plus essayer de travailler, parce que à essayer de faire 50% de chaque chose, on ne fait rien correctement. Donc avant l'été 2020, j'ai arrêté complètement mais je l'avais dit aux backers sur Kickstarter. Je pense que j'ai pris un bon quatre-cinq mois dans les dents, ça a été intense. En plus de ça, on a eu la bonne idée de déménager, de trouver une maison en pleine pandémie, donc ça non plus ça n’a pas aidé.

Donc le confinement en tant que tel, ça n’a rien changé, mais ce sont tous les à-côtés qui t’ont ralenti ?

Oui, le confinement ça a été, mais les enfants ça a été compliqué. Je pouvais bosser quand elles étaient couchées, de temps en temps, mais qu’est-ce que tu fais une heure le soir quand tu as déjà une journée dans les pattes avec les gamins ? C’était pas très productif. J’avais toujours quelques bricoles à faire, je pouvais composer, faire deux-trois animations, mais c’était pas ça. Après, je sais un peu comment ça s’est passé en France par ma famille, mais au Canada on a eu de la chance, on a touché des aides, donc finalement l’argent du Kickstarter j’ai pu ne pas y toucher pendant quelques mois, et il n’y a pas eu de pénalité autre que de demander aux gens d’attendre encore plus.

Pour moi Lunark c'est plus un jeu qui va être agréable à jouer sur sur console portable ou Steam Deck.




Concernant les limitations, notamment la résolution, tu penses que le jeu sera plus à son aise sur une Switch ou un Steam Deck que sur la grosse télé 70” du salon ?

C'est sûr. Il y avait une option que j'ai dû enlever pour des raisons de compatibilité avec certaines consoles : on pouvait passer le jeu en letterbox en le réduisant et en affichant un background sur les côtés. J'avais fait ça exprès pour les gens qui trouvaient que c'était trop “dans leur face” sur leur 70 pouces, comme tu dis, qu’on puisse au moins réduire la taille de la fenêtre de jeu. Je l'ai laissée longtemps sur la version de démo sur Steam, mais ça posait vraiment trop de problèmes avec les autres consoles en termes de caméra, de d'affichage, donc j'ai dû la virer malheureusement. Mais j'en ai toujours eu conscience, pour moi Lunark c'est plus un jeu qui va être agréable à jouer sur sur console portable ou Steam Deck effectivement… ou alors il ne faut vraiment pas être trop près de son écran parce que ça va piquer. Mais c'est un choix, dès le départ j'avais prévu ce jeu avec une densité de pixels d'une Game Gear ou d'une Game Boy, donc je savais où j'allais.

Le fait que ça soit un jeu Game Maker, tu peux jouer sur des petites machines et notamment des machines avec des petits écrans intégrés. Du coup, c'est moins un frein que si t'avais un jeu qui te demandait une 3090 pour tourner

Non c'est sûr, le jeu n’est pas très gourmand. Lunark pèse moins de 200 Mo tout mouillé, il est vraiment léger. Mais curieusement, quand j'ai porté le jeu sur Switch, j'ai dû faire beaucoup d'optimisation pour avoir du 60 images/seconde. La Switch est vraiment dure à ”satisfaire”, elle n’a pas beaucoup de mémoire vidéo... J'aurais pu croire que Lunark allait se faire porter super facilement sur sur Switch vu que le jeu n’est vraiment pas très gourmand en ressources, mais il a quand même fallu que je repasse dans mon code, quand je faisais une boucle “for” de trop que je simplifie, diviser des appels par deux pour que ça demande deux fois moins de ressources sur la console. C'était pas catastrophique non plus, on descendait à 50 FPS, mais ça sentait et quand tu joues à un jeu comme ça, tu t'attends absolument pas à ce qu’il y ait des ralentissements, donc il fallait vraiment que ce soit nickel. J'étais surpris mais tout le monde me l'avait dit, “la Switch est super difficile”, tout le monde doit downgrader ses textures… mais je m'attendais pas à ce que pour moi ça soit le cas aussi. Mais dites pas du mal de Nintendo dans l'article hein, c'est une super console, je l'aime d'amour. Mais j'ai plus conscience maintenant du travail de fou que font les devs quand ils portent leurs jeux sur Switch. Des Xenoblade, Doom Eternal, c'est fou ce qu'ils sont arrivés à faire avec cette console. Oui, les temps de chargement sont plus longs, c'est sûr, mais en termes de perf c'est incroyable.

Sortir mon jeu sur Switch, c'est un rêve qui devient réalité. En plus il va sortir en édition physique avec Limited Run, donc je vais avoir mon jeu en cartouche sur une console Nintendo, j'aurais jamais cru ça.


C'est surprenant ce que tu nous dis que même pour un jeu “simple” comme Lunark, il a fallu transpirer un peu pour arriver à faire en sorte que la Switch se tienne bien.

C'est là que tu vois que c'est pas gagné d’avance, il faut toujours être vigilant... mais c’est aussi parce que j'ai codé avec les pieds, c'est clair. Mais il y avait d’autres choses qui étaient un peu plus obscures et pour lesquelles il a fallu que je demande de l'aide, que j'aille voir sur les forums… Mais sortir mon jeu sur Switch, c'est un rêve qui devient réalité. En plus il va sortir en édition physique avec Limited Run, donc je vais avoir mon jeu en cartouche sur une console Nintendo, j'aurais jamais cru ça. Quand j’ai fait le Kickstarter et que j'ai été validé Nintendo j’étais comme un dingue, et puis là quand Limited Run est arrivé : “attends, je vais avoir une boîte, avec mon jeu dedans, avec un manuel et tout ?”

Limited Run, c'est le partenariat avec WayForward qui te les a apportés ?

Ca l'a officialisé. Limited Run m’avait contacté autour du Kickstarter en me disant qu’on pourrait faire quelque chose. Et je les connaissais d'avant, pendant Flinthook chez Tribute Games, on avait travaillé avec eux, j'avais fait le design des boîtes des jeux avec eux. donc on se connaissait un peu. Donc j'avais toujours dans un coin de la tête que ça pourrait peut être se faire, mais quand WayForward est arrivé, ils sont arrivés avec parce qu'ils ont un partenariat avec Limited Run pour quasiment tous leurs jeux. Du coup, ça faisait partie du package, il y aura une version collector… Donc je travaille un peu là-dessus en ce moment, on va rajouter des petites bricoles. Après, ça reste un petit jeu aussi pour Limited Run, c'est pas Monkey Island, donc ça reste une petite boîte collector, mais quand même ! Une copie physique, déjà, c'est incroyable.



On va pas te demander une date de sortie.

On est à la fin des portages, les certifications et tout ça. Donc on maintient premier trimestre 2023,  donc fin mars. On essaye de trouver une date d'ici là, et puis on communiquera quand on sera sûrs. Le jeu est fini, il n’y a quasiment plus de bugs. Les seuls trucs que je vois passer, c'est pour les versions consoles que je ne gère pas

Du coup, maintenant que tu en vois le bout et que tu as une vue d’ensemble, quel serait l’élément de ton jeu  dont tu es le plus fier - à part d’avoir une boite avec le “Seal of Quality” Nintendo ? Qu’est-ce que tu retiendras le plus de Lunark ?

C'est vraiment d'avoir posé ma pierre à l'édifice des cinematic platformers, d'éventuellement pouvoir mettre mon jeu dans cette liste qui m'a valu l'exclusion de NeoGAF… C'est vraiment un jeu hommage, c'est parti de quelque chose de très inspiré de Flashback, mais je suis quand même convaincu qu'il a son identité aujourd'hui et j'espère que les gens vont l'aimer pour pour ce qu’il est ça et pas attendre quelque chose de différent. C'est vraiment juste l'accomplissement d'avoir fait ça de A à Z dans dans plutôt de bonnes conditions. J'ai pas fait de burnout, j'ai pas dépensé tout l'argent, j'ai encore le respect des backers qui attendent depuis très longtemps, les pauvres. Je sais qu’il y a des gens qui trouvent le jeu beau, après toute la partie gameplay, réception du public, ça tu ne sais jamais. Donc c'est sûr que ça va être une surprise, la réception des joueurs à comme tu disais tout à l'heure : est-ce que les gens vont embarquer dans ce style de de jeu, de maniabilité, de contraintes… Est-ce que ces contraintes vont être ressenties autant que ça ? Je ne sais pas, ça, c'est vraiment le gros point d'interrogation. J'ai à la fois hâte et pas hâte de découvrir

Et est-ce que tu penses déjà déjà à l'avenir, à l'après Lunark ? Ou pour l'instant tu prévois juste de prendre des vacances et profiter ? Est-ce que tu vas continuer l'aventure Canari en solo, ou alors tu as fait le tour et tu voudrais retourner dans un dans un plus gros studio ?

Je devrais me soucier de ce que je vais faire après, j'ai des pistes… mais j'y arrive pas. WayForward m'a fait des propositions, j'ai beaucoup d'idées pour un Lunark 2 avec sûrement un autre style graphique, ça c'est sûr... Mais j'arrive pas à me projeter, je suis comme face à un mur, pour moi c'est déjà de finir Lunark, alors que dans n'importe quel studio je serais déjà en train de penser au prochain jeu et commencer la préproduction avant que le jeu d'avant soit terminé, logiquement c’est comme ça que ça se passe pour pas avoir de période creuse. Et aussi, ça va déterminer sûrement beaucoup de choses, si Lunark fait un flop total, je vais sûrement hésiter avant de me lancer dans une suite. Maintenant, je m'attends pas à ce qu'il fasse un carton, mais si il y a un engouement relatif pour pour Lunark, peut-être que la voie logique, ça sera d’en faire une suite, et je pense que je serai vraiment motivé parce que j'ai tellement d'idées d'améliorations, de choses que je n’ai pas pu faire, d'amélioration de gameplay… J'ai vraiment le rêve de pouvoir enlever toutes ces frustrations du cinematic platformer qu’on retrouve encore dans Lunark en termes de mobilité. J'ai pas tout essayé et il y a plein de trucs que j'aimerais faire différemment d’un Inside. Je ne veux pas de ces modèles en 3D, tout flottants où tu ne ressens pas la gravité. Je veux quand même faire un jeu basé sur les animations et le réalisme, mais peut-être en low poly... J'ai plein d’idées.

Je me connais et il ne va pas me falloir longtemps avant que j’aie envie de mettre les mains dans le cambouis pour faire autre chose..


Peut-être te libérer un peu de ces contraintes que tu t'es imposées pour cette production ?

Oui, c'est sûr. Je les porte, je sais que ce n'est pas un atout pour vendre le jeu aux joueurs d'aujourd'hui, c'est sûr. J'ai bossé sur d'autres styles de jeu et je vois très bien la différence : dans Flinthook, le personnage était hyper mobile, avec un grappin, complètement à l'opposé. C’est pas que je me tire une balle dans le pied parce que c'est le jeu que je voulais sortir. Donc je ne regrette rien, mais je sais que je ne peux pas parler à autant de gens qu'avec un autre genre de jeu. Donc j'ai toujours cet espoir que je puisse parler à plus de monde, ou rendre ce genre encore plus mainstream en le tweakant, en le simplifiant un peu… mais différemment de ce qu'ont fait les autres. Et à côté de ça, j'ai envie de faire d'autres jeux, et WayForward seraient capables d'apporter ces opportunités, ils m’en ont déjà parlé. Donc la balle est dans mon camp, mais je ne suis pas capable de la saisir. C'est bizarre cette période de fin de production en ayant travaillé autant sur un jeu, je suis quand même un peu brûlé. et que j'ai besoin de repos. Mais je me connais et il ne va pas me falloir longtemps avant que j’aie envie de mettre les mains dans le cambouis pour faire autre chose..

C'est là aussi que tu as la chance d'être avec WayForward qui ne va pas te presser en te disant “Hé,où est-ce que t’en es, est-ce que t'as pensé à la suite ?”

Ils me demandent quand même régulièrement parce qu’ils sont toujours à la recherche de personnes pour leurs jeux, de directeurs graphique, artistique… Ils ont bien aimé notre collaboration, donc ils sont demandeurs, et c'est flatteur, je suis vraiment très content de ça. C'est peut être aussi une bonne opportunité professionnelle pour moi, si jamais je décide d’aller dans cette voie-là. Tout est possible, ils m'ont dit qu’ils me suivraient sur un Lunark 2 - déjà contractuellement, je suis obligé de leur proposer Lunark 2 à eux d'abord, comme ça se fait avec un publisher. Il faut que je reprenne Game Maker, que je lance des protos, que je regarde sur quoi je veux aller. Peut-être Unity, pour voir ce dont je suis capable en 3D… Honnêtement, c'est flou, j'ai la tête trop prise par Lunark pour l'instant.

Est-ce que tu sais déjà si tu continueras de faire homme-orchestre, faire absolument tout de A à Z ? Ou est-ce que tu sais déjà que tu voudrais être entouré, éventuellement déléguer certaines parties d’un futur jeu ?

Ça dépendra du projet, mais je ne veux vraiment plus bosser tout seul, ça me manque trop de faire du brainstorming avec quelqu'un d'autre que mon miroir, et d'être surpris par d'autres idées. Tu as beau avoir ton projet qui est tout prêt depuis le début, tu peux savoir où tu vas mais ça manque quand même cette émulation, cette créativité quand tu es à plusieurs. C’est dur de penser “out of the box” que tu es tout seul. Tu vas aller prendre l'air, prendre une douche, regarder un film… il peut y avoir des idées qui vont venir, mais ça va tellement plus vite et c’est tellement plus sympa avec des collaborateurs. Et quand je vois aussi le temps que ça me prend de programmer par rapport à quelqu'un d'autre… À un moment, il faut s'avouer vaincu, chacun son métier. Je sais où sont mes forces, je sais où sont mes faiblesses et si je fais un prochain projet, ça sera pour apprendre de cette expérience et ne plus mettre mon énergie là où ça n’en vaut pas la peine. Donc clairement, la première étape, ça serait de trouver un programmeur pour m'aider à prototyper ce nouveau projet, s'il a lieu, et ensuite si les finances le permettent, m'entourer d’une équipe. Ça ne m'empêchera pas de faire des projets à côté en solo, des petits jeux, j'ai toujours des idées à la con à prototyper sur Game Maker, ou faire des petits jeux de jam, ça me démangera toujours… mais un gros projet, ou en tout cas un long projet comme Lunark, tout seul, ce n’est pas sain, sur le long terme.
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