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Gorogoa : l'épure du plaisir

miniblob par miniblob,  email  @ptiblob
Développeur / Editeur : Annapurna Interactive Jason Roberts
Supports : PC / iOS / Switch
On vous a dit un jour « plus c'est long, plus c'est bon », et depuis vous avez le malheur de faire durer à l'excès tout ce qui pourrait vous apporter du plaisir. Dénuée d'apogée, votre vie est devenue une inlassable et morne course à la jouissance qui peine de plus en plus à atteindre des sommets. Rassurez-vous, le remède est à portée de main : Gorogoa est un jeu qui vous réconciliera avec la dimension éphémère et unique des vrais petits instants de bonheur.
Les choses semblaient pourtant assez mal barrées pour Gorogoa. Présenté une première fois en 2012, le titre avait suscité pas mal d'intérêt, remportant même quelques prix au passage. Seulement voilà, porter quasiment seul le développement d'un jeu vidéo n'est pas une tâche aisée, son auteur Jason Roberts s'est retrouvé totalement embourbé dans le processus. Accablé par les problèmes financiers et sans doute aussi un peu perdu dans une masse surabondante d'idées en tout genre, le projet a bien failli ne pas voir le jour. Finalement, c'est Annapurna Interactive qui l'a sauvé de la noyade, l'éditeur de What Remains of Edith Finch ou de Kentucky Route Zero lui a apporté son soutien, permettant enfin à Gorogoa de débarquer sur PC, iOS et Switch à la fin de l'année 2017.

Fenêtres sur court

Gorogoa fonctionne sur un principe bête comme chou, en apparence tout du moins. L'écran est généralement divisé en quatre petites lucarnes, autant de fenêtres ouvertes sur des temporalités ou des mondes différents. Les actions offertes au joueur sont très limitées : parfois il peut se déplacer à droite ou à gauche dans ces images, zoomer ou dézoomer sur un élément, mais surtout prendre une vignette pour ensuite la changer de case. Ce simple geste peut avoir plusieurs conséquences : soit on élargit un peu notre vision du monde représenté sur l'image en question en dévoilant ce qui l'entoure, soit on déplace l'image un peu à la façon d'un calque pour ensuite la superposer à une autre, soit enfin on cherche une nouvelle organisation pour faire correspondre les différentes images et permettre des interactions entre celles-ci. Ça vous semble un peu brumeux ? En gros, il s'agit toujours de faire interagir les vignettes les unes avec les autres histoire de faire émerger du sens là où on n'en voyait pas au premier abord.


C'est bien joli de s'amuser à tripoter des images, mais à quoi ça sert ? Croyez-le ou non, Gorogoa propose un scénario. L'histoire en question est souvent nébuleuse, la trame narrative ne saute pas toujours aux yeux, mais en gros on suit les tracas d'un individu qui cherche à empêcher une gigantesque créature mythologique multicolore de détruire sa ville. Pour ce faire, il va devoir rassembler cinq boules de toutes les couleurs, un peu comme la version arc-en-ciel de la quête de Shenron. Pour retrouver ces boules, le joueur devra faire interagir des éléments piochés dans différentes réalités et dans différentes époques. On comprend ainsi que la méchante bestiole n'est sans doute qu'un autre visage de la guerre qui ravage tout sur son passage. L'ensemble du scénario peut être vu comme une grande métaphore sur le processus de vieillissement, les différents âges de la vie ou encore sur les ravages de la solitude et de la dépression. Bref, on y trouve un peu ce qu'on y amène, mais on ne s'en offusque pas vu que l'ensemble sonne suffisamment juste et ne verse jamais dans le pathos facile.

J'aime ton air mécanique

On a parfois l'impression que Gorogoa parle en creux de la difficulté de mener sa barque sur le fleuve de la vie, la gestation toute particulière du jeu n'est sans doute pas étrangère à cela. Jason Roberts ne s'en cache pas, il a d'abord conçu une foule de puzzles qu'il a du ensuite mettre à la poubelle parce qu'ils ne trouvaient pas leur place dans l'aventure ou parce qu'ils constituaient des doublons (jetez un œil à cet article de Rock Paper Shotgun si ce processus de création vous intéresse). La conception de Gorogoa a été longue et laborieuse, mais au lieu d'accoucher d'un mille-feuille un peu indigeste, elle a donné lieu à une sorte de concentré, un résultat des plus épuré. Pour ma part, il m'a fallu environ une heure et demie pour voir la fin de l'aventure, mais j'ai triché, j'y avais déjà joué assez longuement en salon. Quand on le découvre, il faut sans doute plutôt compter sur un peu plus de deux heures pour le boucler. Ça reste très court, faut-il lui en tenir rigueur ?

Il faut bien comprendre que cette brièveté signifie aussi une absence totale de temps mort ou de redite dans les puzzles. On passe d'une énigme à l'autre avec une constante sensation de découverte et d'émerveillement. Au final, le tout se tient dans une cohérence incroyable, comme les différentes facettes d'un même mécanisme parfaitement huilé. S'il vous est déjà arrivé de tomber dans une transe extatique en regardant fonctionner une machine-outil automatisée parfaitement calibrée, vous connaissez déjà cette sensation entière et agréable que tout est à sa place. Ajoutez à cela un renouvellement constant, une musique douce et un peu tripante signée Joel Corelitz, et on n'est plus très loin de l'extase. Gorogoa se déploie juste à la bonne vitesse et avec la bonne amplitude dans l'esprit du joueur, c'est une mécanique qui roule à la perfection. Bref, on s'emballe sans doute un peu, mais ce n'est pas totalement immérité.

La fausse simplicité de Gorogoa nous ramène à une forme de pureté. C'est assez étrange à décrire mais il en résulte un paisible plaisir à résoudre les différentes énigmes. Une belle réussite donc pour un titre qui ne nous aura pas fait poireauter en vain.

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