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Pipistrello and the Cursed Yoyo : GBA mon amour

Développeur / Editeur : Pocket Trap PM Studios Inc.
Balancer des trucs à la tête des gens, c'est un petit peu le crédo des Brésiliens de Pocket Trap. Après le très bon Ninjin: Clash of Carrots adapté de l'anime éponyme qui mélangeait beat'em up et shoot'em up à base de carottes, ils ont à nouveau assouvi leur passion du lancer de boulettes avec Dodgeball Academia. Là encore, succès garanti pour cette revisite du sport américain dans un univers complètement loufoque. Jamais deux sans trois et cette-fois-ci, ils s'attaquent à un sport de combat méconnu du grand public, le jeté de yo-yo.
Pipistrello and the Cursed Yoyo nous raconte les aventures d'une chauve-souris fauchée qui se retrouve bien malgré elle à transbahuter l'âme de sa tantine dans son yo-yo enchanté pour l'occasion. Pippit est un gosse de riche qui se cherche et vit de l'argent qui lui est régulièrement donné par sa tante. Madame Pipistrello croule en effet sous les brouzoufs depuis qu'elle supervise l'entreprise familiale d'énergie qui alimente tout New Volt City et fait par la même raquer tous ses habitants. Et c'est sans le sou, mais avec un yo-yo (sa nouvelle passion du moment) qu'il déboule dans le manoir familial pour quémander du pognon à sa tata. Sauf qu'il débarque en plein coup d'État ! Quatre caïds locaux font irruption dans le bureau de la boss et ont pour projet d'aspirer son essence pour alimenter quatre mégabatteries et profiter pour leur compte d'une énergie gratuite et illimitée. Craignant pour l'alimentation continue de son portefeuille, Pippit s'interpose et l'âme de sa tante se retrouve enfermée dans son yo-yo. À partir de là commence une aventure en duo dans laquelle on va devoir mettre la main sur chacune des mégabatteries pour espérer redonner sa forme pipistrelle à sa tatie.
Ce qui distingue immédiatement le jeu des autres productions du studio, c'est sa patte graphique colorée et punchy. Son développeur annonce la couleur dès les premières secondes en affichant une vraie fausse console portable époque GBA en 3D qui tourne sur elle-même, se fige un instant et zoome sur son écran avant de nous présenter le menu du jeu. Que ce soit clair, on est ici face à un digne représentant de la portable reine des années 2000. Tout ou presque fait Game Boy Advance. Seuls les éclairages chiadés du pixel art détonnent, mais pour le reste, on nous dirait que le titre est disponible en romhack que ça ne nous étonnerait même pas. Le pixel art léché est au service d'une direction artistique là aussi qui détonne et rappelle certains des titres du début des années 2000, avec ses animaux anthropomorphes aux mensurations exagérées et aux sprites qui gigotent lorsqu'ils nous parlent. Même la carte de la ville fait d'époque, avec ses blocs grossiers, mais qui permettent tout de même de bien s'y repérer et ses balises faites d'une poignée de pixels. La bande originale elle est parfaitement dans l'esprit chiptune et son compositeur Leonardo Lima s'est même offert un featuring de la légendaire Yoko Shimomura !
Pour notre grand plaisir, le titre reprend également la formule phare Zelda-esque/Metroidvania écran par écran qu'on adore (coucou Minish Cap, tu nous manques toujours autant) dans lequel on arpente une ville-monde qui s'ouvre de plus en plus au fil du déverrouillage des capacités de notre yo-yo magique. Ainsi, on déambule de quartier en quartier jusqu'aux quatre QG des kidnappeurs de tata. On y rencontre des personnages hauts en couleur qui ont toujours quelque chose de drôle à dire et qui parfois nous demandent de l'aide, ce qui nous envoie dans des quêtes secondaires jamais pénibles. Comme dans son grand frère Tears of the Kingdom, on se rend rapidement compte qu'il existe un vaste réseau d'égouts sous la ville qui va se révéler d'une importance capitale pour pouvoir se déplacer entre plusieurs secteurs complètement bloqués. L'exploration est relativement libre puisqu'on nous laisse décider par deux fois quel "donjon" aller explorer en premier. Et quand on dit donjon, on parle d'une zone de chantier aux mains d'un entrepreneur véreux, d'un stade de football dans lequel un bookmaker tient des paris truqués, une convention de cosplay aux files interminables et j'en passe.

Franchement, les dialogues et situations de jeu sont vraiment hilarants et pour ne rien gâcher, Pipistrello and the Cursed Yoyo peut se targuer d'une adaptation française vraiment admirable. Et lorsqu'on ne tape pas la causette avec les citoyens de New Volt City, on passe le reste de son temps à bastonner tout ce qui se présente devant notre yo-yo. En plus d'attaques standards, le jeu vient régulièrement ajouter des techniques spéciales nécessitant de charger son tir (lancer en rafales, lancer tournoyant, réaction en chaîne, etc.). Il compte aussi des capacités de mouvement comme la "promenade du chien" qui permet de rouler en ligne droite sur les surfaces liquides, le maintien en l'air du yo-yo façon toupie pendant un laps de temps, ou encore une compétence qui nous permet de nous projeter en avant depuis un mur proche et d'atteindre des zones qu'on pensait impossible à traverser. Enfin, les biseaux présents un peu partout dans les niveaux font rebondir le yo-yo pour apporter encore plus de complexité, mais également se sauver de situations de combat difficiles en profitant de l'environnement.
Avec un tel panel de mouvements à notre disposition, contrôler Pippit est un vrai bonheur et même si certains puzzles environnementaux doivent être refaits en boucle un certain nombre de fois jusqu'à l'énervement avant d'arriver à les passer (le jeu offre sa dose de par coeur à certains moments), on n'est jamais pris en défaut par un gameplay approximatif. Le titre propose enfin un système de locations d'améliorations en deux temps. Tout d'abord, une mécanique de bonus définitifs rarement vus dans le jeu vidéo. En effet, le capitalisme de la famille a déteint sur les cousins/cousines qui gèrent les ateliers accessibles dans notre cachette et ils nous offrent de véritables "prêts" à la consommation de bonus. À leur signature, on obtiendra immédiatement tel ou tel bonus (+1 vie, attaque plus puissante, etc.), mais on sera affublés de malus (-1 vie, ennemis qui ne lâchent plus de coeurs, etc.) et d'une dette qui se remboursera au fil de l'argent récolté pendant la partie. Un mécanisme vraiment intéressant qui force à prendre des risques durant un certain temps. À côté de ça, de nombreux badges sont cachés un peu partout en ville et offrent des bonus que l'on peut intervertir à volonté pour se faire son propre build (attaques plus puissantes lors d'un saut, possibilité de voir la barre de vie des ennemis, etc.).

On ne va pas se mentir, Pipistrello offre aussi son lot de difficultés. On l'a dit plus haut, certains puzzles requièrent de la dextérité en nous demandant notamment d'exécuter des mouvements de tous types en cumulant les techniques pour se balader par-dessus le vide et il y a certains passages plus compliqués que d'autres. Idem avec la difficulté des ennemis qui est globalement bonne. Seul le premier (ou second dépendant de votre choix) boss nous a donné du fil à retordre. Heureusement pour ceux qui ne sont plus habitués à une difficulté elle aussi d'époque, le jeu propose un menu d'option d'accessibilité assez dingue dans lequel on peut aller jusqu'à se rajouter des coeurs de vie, infliger plus (ou moins !) de dégâts, gérer les dégâts subis, l'argent perdu après un game over, etc. Le jeu est clairement orienté vers le speedrun et nul doute qu'on verra fleurir de jolis runs à l'avenir. Il m'a fallu au moins 16 heures pour terminer la campagne en prenant mon temps, sachant qu'il me reste encore plein de badges à dénicher et de réceptacles de coeurs à choper. Mais j'ai envie de continuer. Pour tout vous dire, il n'y a pas une minute à jeter dans Pipistrello, on ne s'y ennuie jamais, il y a toujours un animal bizarre qui veut me raconter sa vie, ou une salle mystérieuse avec un bonus au fond apparemment impossible à attraper.
Dernier détail sur la fluidité du jeu dans sa version Switch, il fait presqu'un sans faute. Seul un niveau bourré d'explosions et d'apparitions d'assets sur la fin occasionne un ralentissement un peu désagréable, l'espace de trente secondes.
Bref, que ce soit dans ses mécaniques ou sa direction artistique, Pipistrello and the Cursed Yoyo a tout compris à l'époque bénie de la GBA. C'est un de ces jeux qu'on a du mal à lâcher et où l'on se dit : "Allez, encore une salle de plus avant d'aller au dodo..." avant de se retrouver toujours debout deux heures plus tard en train de courir après un énième badge caché à l'autre bout de la carte. Alors, faites une bonne action, et adoptez-moi cette chauve-souris-là.
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