TEST
Minute test, Junji Ito Maniac: An Infinite Gaol
Développeur / Editeur : Softstar Entertainment
Junji Ito Maniac: An Infinite Gaol est arrivé sans prévenir le 11 novembre dernier. Softstar Entertainment l’a même sorti à petit prix, ce qui laissait supposer un titre sans grandes ambitions, malgré le fait que l’œuvre de Junji Itō quant à elle ne l’est vraiment pas. Alors, est-ce que ce jeu d’horreur en vue subjective mérite qu’on lui laisse une chance, ou bien vaut-il mieux passer son chemin ?
Test réalisé sur une version commerciale du jeu.
Ouvre les yeux
Vous êtes un étudiant nommé Yota Takahashi et vous vous réveillez sans le moindre souvenir dans un immense manoir, vous demandant ce que vous faites là. Mis à part les quelques portes fermées provisoirement de l’autre côté, force est de constater que pas mal de pièces de l’endroit sont visitables d’entrée, comme le rez-de-chaussée, le premier étage, le grenier et la cave. Le seul hic, c'est que pour progresser face aux ennemis, vous avez trois solutions : les pièges à loup, que vous pouvez porter jusqu’au nombre de cinq (mais vous n’avez pas assez de force pour porter une carte de l’endroit disponibles dans les chambres) ; la possibilité de projeter des éléments du décor ; ou vous cacher dans des armoires. Mis à part les quelques boss du jeu, les seuls adversaires que vous rencontrerez sont des statues, parfois sans tête, traînant dans la demeure et qui proviennent de la nouvelle Headless Sculptures. Pas glop.
Donc, pour vous repérer dans le jeu, soit vous avez une bonne mémoire, ce qui n’est pas mon cas, soit vous avez pris en photo les étages du plan… Et là, vous me demanderez à juste titre : "Mais c’est quoi, le but du jeu ?" Et je vous répondrai : "Bah, sortir du manoir". Et comme le titre le laisse entendre, il s’agit d’une prison infinie, par ailleurs bien optimisée, joliment modélisée et qui nous donne au départ l’impression d’être dans un labyrinthe. On ressent de la tension, surtout du fait des portes qui claquent, du sound design et de la musique inspirée... mais vu que chaque mort n'est un "mauvais rêve", sans conséquences, ni dans la progression, ni sur les items collectés, le stress retombe un peu. J’ai même trouvé que cela cassait bien le rythme.
Tomie

Le fil conducteur est matérialisé par le personnage le plus emblématique de Junji Itō, la charmante Tomie (Tomié) modélisée comme une poupée de porcelaine et magnifiquement interprétée en japonais (tout le jeu est sous-titré, je vous rassure, même s’il y a des oublis ici et là). En chevalier protecteur, vous devez l’aider à sortir également du manoir. Plus le temps passe, plus vous trouverez des indices sur ce qu’il s’est passé précédemment en ce lieu. Vous serez rapidement rejoint par une détective, Rin, qui enquête sur les événements qui se sont produits dans le manoir. Vous les retrouverez toutes les deux dans l'une des rares pièces de sécurité, où le jeu sauvegarde automatiquement et où surtout vous ne serez pas embêté par les sculptures.
Votre but étant de partir, vous aurez plusieurs possibilités d’arriver à la fin. Vous devrez résoudre des énigmes assez simples, mais surtout affronter des boss (parfois relous) inspirés là encore de nouvelles, comme La chevelure sous le toit, The Hanging Balloons ou encore à nouveau Headless Sculptures. Il y a également beaucoup de clins d’œil à différentes nouvelles adaptées dans la série animée Netflix Maniac par Junji Itō : Anthologie Macabre sortie en 2023 dont le jeu s’inspire. On s’amuse d'ailleurs plus à essayer de les identifier plutôt que de jouer au jeu. On retrouve même le chat d’une nouvelle qui concerne l’insupportable Soïchi.
The Tunnel
Pas vraiment un pur hommage, on peut considérer que Softstar Entertainment a en réalité fait une adaptation de son propre univers en le mêlant à celui de Junji Itō. On retrouve d’ailleurs quelques composantes du gameplay de leurs précédentes productions qui étaient déjà compatibles avec l'esprit de l'auteur. Par contre, les développeurs ont de leur propre aveu utilisé de l’IA pour certaines textures qu’ils ont par la suite retouchées, contribuant ainsi symboliquement à ce que le joueur ait l'impression d'une sorte de patchwork artificiel d'une de leurs précédentes productions mélangée avec un peu de Junji Itō.C’est aussi pour cela que la tension retombe vite, le titre étant par ailleurs un peu répétitif, donnant parfois l'impression de ne jamais voir le bout du tunnel. Pourtant, il est très court et on peut le finir en moins d’une heure. Toutefois, le principe étant "la prison infinie", les trois fins font parties intégrantes de l’histoire. Celle-ci est en revanche bien racontée, je trouve, et essaie de coller scrupuleusement aux thèmes chers à l’auteur. Nous n’avons heureusement pas affaire à des manchots, mais on va dire que l’on comprend aussi pourquoi le produit emballé est vendu à petit prix.
Junji Ito Maniac: An Infinite Gaol vous laissera probablement sur votre faim. Bien qu’assez propre dans l’ensemble et dépourvu de bugs, il manque clairement de matière. Pour un premier jeu adapté d’un des maîtres de l’horreur, on pourrait le considérer au mieux comme satisfaisant au vu de son petit prix. Cependant, l’univers du maître méritait un traitement beaucoup plus circonduit. Parce qu'en dehors de quelques séquences réussies, il faut reconnaître que pour un titre si court, on se fait quand même un peu chier. Pour finir sur une note d’espoir, le jeu ayant été relativement bien accueilli par les joueurs, principalement des fans de l’auteur, on est en droit d’espérer un jeu plus ambitieux, d’ailleurs pourquoi pas avec un scénario de Junji Itō himself, ou même l’adaptation d’Uzumaki par exemple. Hum, on a le droit de rêver.