TEST
Absolum
Après avoir brillamment travaillé sur Streets of Rage 4, le studio Guard Crush Games lâche cette fois-ci les rues de Wood Oak City pour revenir à un style penchant très fortement sur la fantasy, sans aller jusqu’au mec en slip de Golden Axe. Alors, si en plus, l’aventure est saupoudrée de mécaniques roguelite et d’une esthétique à tomber par terre, cela vaut le coup d'y jeter un œil.
Talamh, c'était mieux avant
L’aventure se déroule dans le royaume de Talamh, dans lequel la vie était paisible et tranquille, bien aidé par l'ordre des Sœurs-Racines et leur magie. Mais un jour, un cataclysme magique s’est abattu sur le royaume, provoqué par des mages un peu trop ambitieux et a eu pour résultat de faire sombrer Talamh. Profitant de cette erreur, le Roi Soleil Azra a fait capturer tous les mages et sorciers du continent via son Ordre Pourpre, puis a placé ses plus loyaux sujets dans les différentes régions du royaume, afin de régner en seul maître à bord.
Ce fut le début d’une ère moins cool pour le peuple de Talamh, privé de magie bienfaisante et sous les ordres du Roi Soleil Azra. Cependant, la grande enchanteresse Uchawi, et dernière Sœur-Racine, réussit à former un petit groupe de rebelles pour défier Azra et rétablir la paix. Nous faisons donc connaissance avec Galandra dans un premier temps, une mage détenant une épée mortelle et maîtrisant des pouvoirs nécromantiques. Elle est accompagnée de Karl, le nain du coin, armé d’un tromblon et de ses poings, extrêmement fort au corps-à-corps. Par la suite, Cider et Brome vont se joindre à ce duo. Le premier étant un spécialiste en arts martiaux, tandis que le second est une grenouille qui balance des éclairs.
Beat ’em up ou roguelite ?
Les deux ! Et c’est d’ailleurs cela qui m’a attiré dans Absolum, alors que pourtant, je ne suis pas un gros joueur de roguelite. J’ai bien passé quelques dizaines d’heures sur Balatro, mais j’ai par exemple assez peu joué à Dead Cells qui m’est rapidement tombé des mains (faudrait que je retente), et je n’ai jamais acheté Hades et sa récente suite, Hades II. Cependant, si comme moi, vous aimez les beat ’em ups à défilement horizontal, Absolum est probablement fait pour vous.Comme dans tout bon roguelite, on commence dans une sorte de hub principal, avec notre personnage (que l’on peut changer) et nos capacités que l’on augmentera au fur et à mesure de l’aventure. Sans révolutionner le genre, il faudra ensuite enchaîner les niveaux à la manière d’un beat ’em up arcade, comme Streets of Rage, Final Fight, Double Dragon ou encore Golden Axe, pour ne citer que les licences qui m’ont réellement marqué, avec tout de même une grosse différence notable : aucun des lieux n’est généré aléatoirement et il y a de multiples embranchements qui ne seront pas les mêmes suivant le personnage choisi. C’est très varié, mais on tombe tout de même dans le classique niveau à franchir pour arriver à un boss, afin de changer de région pour repartir dans un nouveau niveau et un nouveau boss, jusqu’à l’affrontement final.

Cependant, le studio a eu la bonne idée d’ajouter tout un tas de quêtes qui se dévoileront en fonction de nos exploits et de nos choix, activant divers passages secrets et chemins parallèles. Là aussi, on est dans le roguelite classique, mais c’est très bien fait et tellement bien maîtrisé que la magie fonctionne parfaitement. On se met donc en quête d’essayer d’aller le plus loin possible, pour mourir bêtement contre un boss, pour ensuite relancer un run et tenter un nouveau chemin.
Comme je le disais plus haut, Absolum est aussi un beat ’em up et là, on peut dire que le fait que ce soit Guard Crush Games aux manettes se ressent beaucoup, ce qui est un compliment. Sur ce point, on connaissait déjà le talent du studio avec Streets of Rage 4 et ici, les Canadiens se sont encore surpassés. On y trouve tout ce qui fait ce style de jeu, avec des déplacements de personnages assez simples, un saut, une attaque rapide/légère, une autre lente/lourde, une prise au corps-à-corps pour balancer les ennemis, la possibilité d’attaper un objet pour s’en servir d’arme et un spécial, qui se traduit ici par une attaque magique qui consomme de la mana. Et évidemment, cette mana est contenue dans une jauge qui se remplit en tapant des méchants. C’est magique.

Sauf qu'au fur et à mesure que l’on joue, les petits camarades que l’on croise à notre camp nous apprennent deux ou trois astuces pas déconnantes. Par exemple, une attaque lourde fait baisser la vie de l’adversaire plus rapidement, mais elle peut aussi créer un clash suivant un timing, permettant d’étourdir l’ennemi et donc, de l’enchaîner une nouvelle fois avec d'autres combinaisons de coups. De plus, chaque personnage dispose d’une esquive, qui peut se faire latéralement pour ajouter une contre-attaque directe, ou de manière frontale pour parer l’attaque adverse.
Si tout cela est déjà très bien pour un simple beat ’em up, la structure roguelite du jeu permet évidemment de varier chaque run à coup d’objets et de runes récupérés ici et là, octroyant des effets passifs. Il sera par exemple possible d’ajouter des flammes à l’épée de Galandra, d’emprisonner temporairement des ennemis dans une bulle d'eau, de déclencher de la foudre ou de faire apparaître des plantes carnivores nous aidant à combattre. Au fil des biomes et des niveaux, notre personnage devient de plus en plus puissant, faisant des dégâts assez considérables contre n’importe quel type d’opposant, mais on repart à zéro à chaque mort.

Ajoutons à cela que battre un boss donne droit à une deuxième compétence choisie aléatoirement, qui peut modifier totalement notre personnage et notre façon de jouer, remplaçant par exemple notre attaque légère par une autre balançant un pouvoir magique, etc. Les possibilités sont grandes et les variantes gigantesques.
Néanmoins, il est toujours un peu compliqué de se construire une build assez logique. Comme tout se fait au hasard des parties, on peut se retrouver avec un choix de sort de feu à la fin du premier acte, pour ensuite n’avoir que des sorts d’eau, par exemple, dans les autres fins des niveaux de l’aventure. Il faudra donc jouer avec cette part de hasard qui, parfois, me gave un petit peu dans ce style de jeu. Mais c’est aussi ce qui fait le sel des roguelites, avec cette sensation que tout va bien et que l’on pourrait peut-être arriver au boss de fin sans trop de souci, ou au contraire, que tout ne se met pas correctement et qu’il est temps de vite rentrer au camp.
Insert coin
Comme dans une salle d’arcade, Absolum peut se jouer seul ou à deux. Dans le cas d’une partie en mode “canapé avec des trucs à grignoter sur la table basse”, il suffit de connecter une seconde manette et c’est parti pour la bagarre. Toute l’expérience ira sur la sauvegarde du premier joueur, ce qui est toujours appréciable.
Concernant la coopération en ligne, c’est un peu différent mais relativement bien expliqué et très malin. Ici, le studio a fait le choix de se mettre au niveau le plus bas, à savoir sur le joueur qui aura le moins progressé, afin d’éviter les possibles spoilers. Vous venez avec vos compétences propres, mais les quêtes que vous avez débloquées, par exemple au dernier acte, ne seront pas disponibles si l’autre joueur n’a joué que sur l’acte 1. C’est assez malin et cela évite de gâcher l’aventure et la découverte, tout en gagnant tout de même de l'expérience.
Tout fout le camp
Loin d’un Baldur’s Gate 3 avec une vie de camp blindée de dialogues et de sous-quêtes qui peuvent faire basculer le cours de notre aventure, le camp dans Absolum est assez simple, du moins dans un premier temps. C’est le lieu dans lequel on reviendra après chaque run, qu’il soit réussi ou non, afin de dépenser nos cristaux durement acquis lors de l’aventure, dans une sorte de jauge de niveau de progression avec Uchawi : niveau de progression globale, arbre de compétences commun à tous les personnages, techniques spécifiques à chaque combattant, lieu d'entraînement... Tout est là pour nous préparer et nous inciter à repartir à l’aventure le plus rapidement possible.
Cependant, pour un joueur comme moi, à savoir un non initié au style roguelite, la dépense des cristaux peut se faire un peu bêtement. J'en ai en ma possession, je vois un arbre de compétences, et je bourrine tout jusqu’à arriver à la fin de cet arbre. Sauf que l’on va remarquer que ces cristaux servent aussi à relancer l’ensemble des choix de compétences, ce qui peut avoir un intérêt pour les joueurs et joueuses un peu expérimentés en roguelite, souhaitant optimiser chaque run aux petits oignons. Ce n’est pas mon cas, mais il faut le savoir. Et je ne doute pas que l’on trouvera tout un tas de wikis expliquant cela bien mieux à peine quelques semaines après la sortie du jeu.
Comme dit plus haut, la vie au camp n’est pas aussi complète et complexe que dans certains RPG et c’est, honnêtement, tout à fait normal. De fait, on peut assez facilement passer à côté du scénario, qui est pourtant bien écrit et assez chouette à suivre si tant est que l’on aime la fantasy. Un point qui sera certainement bien abordé dans la série animée qui suivra le jeu.
Pas mal, non ? C’est français.
En parlant de série animée, comment passer à côté de la direction artistique absolument fabuleuse d’Absolum ? Si pour Streets of Rage 4, la partie graphique a été faite par Lizardcube, ce n’est pas le cas ici et on retrouve un studio, Supamonks, assez peu connu, puisque généralement cantonné à des bandes-annonces. Et ce n’est pas leurs différents travaux qui ont laissé entrevoir un talent pareil. Pour le coup, Dotemu et Guard Crush Games ont eu le nez fin et on se retrouve avec un titre qui tient du dessin animé. Tout est parfait, dessiné dans les détails avec soin, les différents biomes ont leur ambiance bien distincte, les personnages tout comme les ennemis sont tous parfaitement animés. Quant aux décors, on a juste envie de partir à l’aventure pour découvrir un peu plus le royaume de Talamh. J'ai très hâte de voir le travail sur la série d'animation prévue dans un futur proche.
Tout cela est mis en valeur par des pistes musicales dignes d’un Super Smash Bros ou presque. Bon ok, le titre ne propose pas des centaines de morceaux, mais avoir Gareth Coker (Ori and the Blind Forest, Ori and the Will of the Wisps, Ark: Survival Evolved, Halo Infinite, Prince of Persia: The Lost Crown, etc.) comme responsable de la bande son, ce n’est pas rien. Surtout qu’il est accompagné, pour les boss du bourrin Mick Gordon (Wolfenstein: The New Order, Wolfenstein: The Old Blood, Wolfenstein II: The New Colossus, Doom 2016, Doom Eternal, etc.), de la talentueuse Yuka Kitamura (Dark Souls II, Dark Souls III, Bloodborne, Elden Ring, etc.) mais aussi de l’immense Motoi Sakuraba (Dark Souls et les séries Tales of, Star Ocean, Baten Kaitos, Valkyrie Profile et Golden Sun, etc.). C’est vraiment du très lourd et l’ambiance sonore est absolument sublime.
Est-ce qu’Absolum est en passe de devenir une sorte de petite référence ? Oui. L’équilibre entre gameplay aux petits oignons de Guard Crush Games et beauté folle par Supamonks est parfait et bien choisi. Cependant, si c’est la narration qui vous branche, peut-être que d’autres font mieux, comme Hades et sa suite. Mais si vous souhaitez un beat ’em up avec un aspect roguelite extrêmement bien maîtrisé, Absolum se doit d’être dans votre collection.