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Un Rédacteur Factornews vous demande :

 
TEST

The Thin Silence : Hello darkness, my old friend...

miniblob par miniblob,  email  @ptiblob
Développeur / Editeur : TwoPM Studios Nkidu Games
Supports : PC / Mac
Que vous soyez parano, dépressif ou tout simplement doté d'une piètre estime de vous-même, soyez le ou la bienvenue et montez à bord de notre joyeux test de The Thin Silence. Si vous vous bercez d'illusions, que vous pensez encore que le mot « jeu » est forcément synonyme de fun ou que vous êtes sur le point d'en finir avec votre psychothérapie, cet article devrait heureusement vous remettre sur le droit chemin, celui de la tristesse et du dégoût de soi.
N'allez pas le répéter trop fort, mais je crois bien qu'on m'en veut. Et attention, quand je dis « on », je ne pense pas à une sombre machination sans visage et sans nom, mais bien à quelqu'un de facilement identifiable qui n'est autre que la tête pensante du site sur lequel vous lisez ces quelques lignes. C'est bien simple, l'année dernière on m'avait proposé de tester Rain World. À l'époque, je ne me doutais de rien, j'étais comme ainsi dire jeune et ingénu, je ne savais pas que quelques heures de plongée dans cet univers déprimant suffiraient à me saper le moral pour de bon, me forçant ainsi à suspendre prématurément ma partie. Je croyais encore que ce n'était qu'un accident de parcours isolé, que la vie reprendrait son cours comme si de rien n'était, mais c'était sans compter sur les noirs dessins d'un rédac chef un tantinet sadique qui se plaît à tourmenter ses subalternes. En mettant The Thin Silence sur mon chemin, il espérait sans nul doute me voir craquer, que je me répande sur le sol comme une vieille serpillière mal essorée. Par chance, le jeu ne promet que quatre heures de souffrance, j'ai donc pu encaisser sans pour autant sombrer totalement, il m'a fallu ensuite remonter tout doucement la pente pour vous livrer ce témoignage.

Déprime à bord

Les choses ne semblaient pas si mal partir avec The Thin Silence ; à première vue rien de très dangereux, juste un jeu d'aventure 2D en pixel art avec des prétentions narratives. S'il fallait bannir tous les titres dans ce genre là, la scène indé semblerait soudainement bien dépeuplée. Question scénario, il faut faire preuve d'un peu de patience avant que la lumière ne se fasse. On débute au fond d'un trou sans vraiment jamais savoir ce qu'on y fait. C'est en essayant de rejoindre la surface qu'on va avoir droit à des flash-back et à quelques monologues qui vont petit à petit planter la toile de fond. Vous vous en doutez, le décor en question n'est pas franchement jovial : il y est principalement question d'une guerre civile meurtrière et de ses effets délétères sur la population. Histoire de bien appuyer le propos, on a aussi droit à une bande-son signée Lightfrequency qui joue du piano et du violon pour taper clairement dans le tire-larmes (et qui le fait bien).



Prise au premier degré, l'intrigue manque parfois quelque peu de sens. Pourquoi, par exemple, le protagoniste principal porte-t-il à lui seul la culpabilité du chaos ambiant ? Et surtout, comment ça se fait qu'il se retrouve tout le temps dans des cavernes labyrinthiques ? Vous voyez venir le pot aux roses, il s'agit en réalité d'une sorte de métaphore filée de la dépression. Si vraiment vous avez du mal avec le second degré et que vous êtes du genre à tout prendre au pied de la lettre, un disclaimer s'affichant au lancement du jeu aurait déjà dû vous mettre la puce à l'oreille. Voilà, votre personnage est dépressif, il traîne sa misère d'un bout à l'autre du jeu et vous laisse généreusement l'occasion d'en profiter.

Le voyage de Suisse à Dole, tout en dents de scie

Forcément, histoire de vous mettre bien le nez dans le thème, il se décline aussi sur le terrain de la prise en main. Le ton est donné dès qu'on découvre les déplacements : c'est lent, c'est lourd, c'est poussif, bref, c'est tout le plaisir de patauger dans une rivière de boue en armure lourde qui s'offre à vous. Cerise sur le parpaing, votre personnage peut bondir, mais c'est le plus ridicule des sauts que vous pouvez imaginer, à peine un sursaut, un truc totalement inutile dans le gameplay qui n'est visiblement là que pour vous rappeler à votre condition de vulgaire petite merde. On comprend sans mal l'idée, il s'agit de prendre à contre-pied la convention qui veut que le personnage central d'un jeu vidéo se doit d'être un athlète. Qui donc voudrait incarner un super héros quand on peut se glisser dans la peau d'un éclopé asthmatique ?



La lourdeur ne s'arrête pas là, elle s'étend bien entendu à vos interactions avec les objets. Il est difficile de parler d'énigmes au sujet de ces manipulations puisqu'il s'agit finalement d'utiliser bêtement (et très lentement) des outils. Là où il faudra parfois se creuser les méninges, c'est dans la combinaison des objets, jusqu'à trois, qui sont nécessaires pour la fabrication de ces fameux outils. Cette mécanique de craft aurait pu se montrer divertissante, mais heureusement l'interface est là pour nous rappeler qu'on n'est pas ici pour la rigolade. Véritable déclaration d'amour aux troubles psychomoteurs, la navigation dans les menus reste tout à fait raccord avec le reste du jeu, surtout si vous essayez de l'aborder au combo clavier/souris.

J'ai comme envie d'une feinte au ris de veau...

Malgré tout ce dispositif, il vous reste encore une lueur d'espoir ? The Thin Silence va se faire un plaisir de l'étouffer sous une avalanche de proses aussi inintéressantes les unes que les autres. C'est bien simple, le fait même de découvrir un nouveau texte finira par vous mettre dans cet état de résignation absolue que connaissent bien ceux qui laissent par exemple s'accumuler leur courrier non-traité. Vous voulez prendre un peu de hauteur pour dédramatiser ? Vous vous rendez compte alors que le personnage que vous incarnez est tout à fait détestable puisque, même plongé dans les pires horreurs, il en revient toujours à se lamenter sur sa petite personne et son histoire personnelle. Pour peu que vous vous identifiez à lui, vous pouvez alors sans mal ajouter la haine de soi à la sympathique panoplie de sentiments que vous propose d'expérimenter le jeu.



On ne va pas faire semblant de croire que les cinq dernières minutes soit disant optimistes et les deux ou trois messages vaguement positifs suffisent à contre-balancer toute l'aventure et on va se demander à qui ça s'adresse ? Clairement pas aux personnes déjà dépressives qui sont même explicitement découragées de se lancer par l'avertissement donné au début du jeu. Et par bonheur si le mal de vivre vous est étranger, si vous passer la corde au cou vous semble aussi incongru que de déambuler nu dans le métro une contrebasse à la main, pas sûr que vous apprécierez le voyage (si en revanche ces deux options vous semblent également sympathiques, optez tout de même plutôt pour la version du mélomane naturiste qui devrait davantage amuser vos amis). Reste alors la réponse la plus probable : The Thin Silence pourrait être un projet conçu comme une expérience cathartique par son développeur Ricky James. On espère qu'une fois l'accouchement passé, ça lui a fait du bien, mais on ne voit pas trop qui aujourd'hui pourrait en tirer bénéfice, à part peut-être justement un pervers narcissique qui trouverait là un outil raffiné pour faire souffrir son petit personnel...

Pas de doute là dessus, The Thin Silence est une œuvre sincère, peut-être même un peu trop... Le fond, la forme et le propos s'accordent à merveille, on peut donc parler d'une réussite d'une certaine manière. En un mot, c'est LE jeu qu'il vous faut pour débuter en beauté une sévère dépression.

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