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She Sees Red : Le Hotline Miami dont vous êtes le maso

Rozzo par Rozzo,  email
Développeur / Editeur : Rhinotales
Mi-film, mi-jeu, les Full Motion Video games (abrégés en jeux FMV) sont un genre de niche. Cette niche-là, c’est celle de ceux qui comme votre serviteur, n’arrivent pas à choisir entre deux médias qu’ils vénèrent. Sauf que choisir d’écumer les FMV, ça s’apparente vite à un petit chemin de croix vidéoludique.

Eisenstein n’a qu’à bien se tenir !

Sorti depuis maintenant un peu plus de 6 mois sur la plateforme à l’engrenage qu’on aime détester, She Sees Red a pour le moment tout du succès d’estime. Si le scénario de Hotline Miami  tenait sur un rouleau de papier-toilette, celui des Russes de Rhinotales tient sur un rouleau d'essuie-tout. On suit une « enquêtrice » et son acolyte dans une boîte de nuit où plusieurs meurtres ont été commis. Au fur et à mesure que l’enquête avance de son côté à elle, nous vivons aussi les meurtres du point de vue du tueur. C’est nous qui choisissons ce qu’il a fait, et le déroulement de l’enquête s’adapte. En jouant sur deux temporalités, le jeu forme une proposition intéressante… Qui ne prendra jamais vraiment racine.

Faire une critique de ce genre d’objet vidéoludique plus ou moins identifié n’a rien de simple… Ce qui fait du jeu-vidéo un art et un média à part entière, c’est l’existence de gameplay. Sauf que dans les FMV, il est réduit à sa plus simple expression, que l’on pourrait résumer par trois touches : Gauche, Droite, Valider. Notre personnage arrive dans un couloir, est-ce qu’on prend à droite, ou à gauche ? La pilule bleue, ou la pilule rouge ? La première étape de ce chemin de croix est déjà de réussir en tant que joueur à passer outre cette aridité, elle qui montre que les jeux de Quantic Dream en comparaison sont bien plus que des histoires interactives et méritent leur statut de jeu vidéo. On apprécie néanmoins que le soft soit sous-titré dans un français un peu google-traductionné, mais compréhensible. 



Reste donc à oublier que l’on joue à un jeu, et se laisser porter par une histoire interactive, une sorte de version filmée du Livre Dont Vous Êtes Le Héros. Pourquoi pas après tout. Bien qu’il ne soit pas exempt de défauts, Bandersnatch a prouvé que narrativement, le champ des possibles qui s’ouvrait aux scénaristes et au public est immense. Sans la force de frappe de Mister Netflix, Late Shift, qui avait été porté à mes esgourdes par notre Billou national avait lui aussi montré que, avec moins de moyens mais des bonnes idées on pouvait accoucher d’un FMV habile et bien rythmé. Le défi pour ce genre de titres est là : Réussir à donner corps une histoire non-linéaire en utilisant des dispositifs narratifs qui le sont. Le JV nous permet, a des degrés divers, de vivre notre propre aventure. Le cinéma, toutes proportions gardée, nous fait « subir » celle-ci. Le FMV, c’est donner de la marge au specta-joueur en le laissant choisir comment vont s’ordonner une série de blocs narratifs linéaires. Et c’est vraiment casse-gueule.

Incrédulité Non Suspendue

L’une des principales raisons pour lesquelles l’exercice est complexe est le statut de genre de niche qui lui colle à la peau. Faire un film coûte de l’argent, beaucoup d’argent. Les créateurs de Bandersnatch ont révélé qu’en termes de masse de travail et de budget, le jeu-film leur avait coûté environ deux épisodes et demi de Black Mirror, leur série phare (qu’on vous recommande chaudement) (NDLR: Sauf la saison 5). Les FMV étant un genre de niche, les ventes de ce genre de produit ne sont pas astronomiques, et donc les budgets pour en produire un ne le sont pas non plus. À notre époque où les films et les séries profitent de productions énormes, se fondent l’un dans l’autre et se mélangent, le standard de qualité perçue par le spectateur concernant la technique a lui aussi évolué à la hausse. C’est donc un autre deuil à faire pour le jou-tateur, celui de la qualité technique.

Comme beaucoup d’autres titres en FMV avant et après lui, She Sees Red a beaucoup de mal à se dépatouiller de son côté un peu cheapos. En dehors de scènes de bagarres qui semblent fortement inspirées de « The Raid » et autres « John Wick », on a le sentiment d’avoir un film-jeu qui se passe dans une série de couloirs mal éclairés, labyrinthiques, un peu cache-misères. On retrouve quand même des bonnes idées de mise en scène pour compenser ces costumes un peu trop propres et ses personnages qui sont un peu trop dans la caricature. L’enquêtrice un peu hautaine, Check. Le mafieux russe chauve, Check. Le tueur à casquette, Check.



Depuis le début qu'on tourne autour du pot, on a réussi pour le moment à éluder la chose la plus importante dans ce style de jeu : la narration. Qu’importe le budget, qu’importe la technique, qu’importe le jeu des acteurs, si l’histoire qu’on nous raconte est belle et les choix que l’on doit faire font sens. Dans She Sees Red, c’est un peu raté. Les choix que l’ont fait n’ont pas au final beaucoup d’impact, vu que l’on se retrouve souvent à la même destination en bout de route... Vu que pour avoir l'histoire complète, il faut recommencer une deuxième fois la boucle de jeu de 45 minutes. On choisit d’aller à gauche, ou à droite. De tuer gratuitement ou non ce garde qui n’avait rien demandé, ou de jeter ou non cette drogue dure qu’on a trouvée.

Et le « mystère » du jeu, c’est-à-dire l’identité du tireur, se révèle dès la fin de la première partie au bout de 45 minutes, au terme de l’une des 4 fins du jeu. Pire, dès son commencement, le titre ne prend pas le temps d’introduire son univers, le lieu de l’action et les personnages. Avec le sentiment bizarre d'être arrivé à la bourre au ciné alors que le film a commencé depuis 20 minutes, on essaie peu à peu de reconstituer les pièces du puzzle. Tout ça pour se rendre compte qu'au final, un peu comme dans Memento, l'histoire rassemblée ne casse pas trois pattes à un mafieux tchétchène. Et donc, on se fiche un peu de ce qu’il leur arrive. 
She Sees Red, c’est une petite déception. On pourra passer sur son aspect un peu « cheap », inhérent au genre, mais on ne peut pas accepter cette histoire un peu bancale, avec des personnages trop stéréotypés et son intrigue mal amenée. Et voilà, vous êtes au bout du chemin. Allez, on garde espoir, et on croise les doigts pour qu’arrive bientôt le messie, ce titre dans lequel chaque choix qu’on fera nous permettra de vivre une aventure différente, et satisfaisante.
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