ARTICLE
Copinage : MO5 / Le Musée du Jeu Vidéo
En 1996, aux premières heures d’Internet en France, un certain Philippe Dubois partage sa passion de l’histoire de l’informatique en créant un site dédié sobrement nommé « Le musée d’histoire informatique ». Cet événement, d’apparence anodine, constituera la première pierre de l’association MO5 en 2003 et, 22 ans plus tard, de la création du Musée du Jeu Vidéo. Mais revenons quelques décennies en arrière.
NdCBL : c'est le premier article sur Factornews de Nordine en tant qu'invité mais il a écrit de nombreux papiers pour la presse pro et des sites comme Grospixels ou feu Push Start. Merci aussi à Shenron pour les photos.
Le site créé par Philippe Dubois rencontre un certain succès et lui permet d’entrer en contact avec d’autres personnes passionnées, qui elles aussi collectionnent ce qui est alors considéré comme des antiquités des premières heures de la micro-informatique grand public, à commencer par le Thomson MO5. En ces temps numériques reculés, point de réseaux sociaux, de CMS ou de connexion illimitée, l’Internet de jadis est majoritairement constitué de sites amateurs, de forums de discussion et de canaux IRC. Il faut donc compter chaque minute d’accès si on ne veut pas craquer son PEL pour payer la facture mensuelle.NdCBL : c'est le premier article sur Factornews de Nordine en tant qu'invité mais il a écrit de nombreux papiers pour la presse pro et des sites comme Grospixels ou feu Push Start. Merci aussi à Shenron pour les photos.

Malgré des conditions d’accès à Internet qui, pour les plus jeunes, pourraient paraître invraisemblables, au fil des années, Philippe Dubois se constitue un réseau de connaissances, mais aussi d’amis, avec lesquels l’association MO5 va voir le jour en janvier 2003. Son objectif ? Préserver et valoriser le patrimoine vidéoludique mondial, avec comme point d’orgue la création d’un véritable musée destiné à tous les publics. Avec abnégation, patience et rigueur, MO5 va accumuler progressivement une collection commune de consoles, de micro-ordinateurs, de bornes d’arcade, de jeux vidéo, mais aussi de magazines et de nombreux autres documents en lien avec le JV et son histoire.
L’association traversera diverses épreuves, comme le déménagement en urgence de sa collection depuis le sous-sol d’un collège dans le courant des années 2000 vers un lieu plus adapté dans la ville d’Arcueil. Mais bon gré mal gré, MO5 continue sa route, enrichissant sa collection par le biais de dons de particuliers, mais aussi en renforçant ses effectifs de bénévoles dévoués et aux compétences multiples, constituant ce qui deviendra progressivement la plus importante collection publique européenne en matière de jeu vidéo.

Progressivement, l’association se fait connaître en réalisant ses premières expositions destinées au grand public, parmi lesquelles de régulières participations à la Japan Expo et à la Paris Games Week. Mais ce qui fera connaître MO5 au plus grand nombre, c'est sans doute l’exposition Game Story qui se tiendra au Grand Palais à l’hiver 2011-2012. Cet événement majeur dans l’histoire de MO5, et plus largement dans l’histoire de la culture vidéoludique en France, sera le point de départ pour d’autres expositions d’ampleur telles que Game à la Fondation EDF ou le retour de Game Story à Versailles, face au célèbre château.
En parallèle, l’association mène un travail pédagogique de fond en communiquant régulièrement sur l’histoire du jeu vidéo, ses figures majeures et ses petites histoires qui composent la grande histoire de ce média : podcasts, vidéos, streaming, conférences et débats complètent les expositions proposées. Aujourd’hui forte d’environ 650 membres (parmi lesquels des membres d’honneur tels que Tetsuya Mizuguchi, Jordan Mechner, Eric Chahi ou encore feu Ralph Baer), MO5 a officiellement ouvert son Musée du Jeu Vidéo en décembre 2025 au cœur de l’ancien hôtel de ville d’Arcueil.

Réparti sur deux grands étages et de nombreuses salles, le Musée du Jeu Vidéo propose une visite dans la chronologie de ce média, de ses premiers balbutiements jusqu’à nos jours. On y découvre progressivement, classés par périodes et constructeurs, les micro-ordinateurs, bornes d’arcade et consoles qui ont fait son histoire. Chaque machine est accompagnée de supports pédagogiques bilingues français-anglais qui permettent de mieux comprendre le contexte de l’époque, mais aussi leur impact sur la première industrie de loisir au monde. Des vitrines complètent l’historique de ces machines et de ces constructeurs, présentant de nombreuses pièces rares agrémentées de mini-supports enrichis de QR codes menant vers des vidéos ou des articles qui agrémentent les informations proposées.
L’une des particularités du musée est que la quasi totalité des machines est jouable et en libre accès. Les titres proposés sont sélectionnés avec soin par l’équipe, avec des jeux à la fois accessibles au plus grand nombre et ayant marqué ce média par leur gameplay, leur direction artistique ou d’autres éléments spécifiques. Ainsi, on peut s’essayer au vénérable Tennis for Two, à la folie californienne de Crazy Taxi, au fun inégalé de Saturn Bomberman ou à la nanardise de Link: The Faces of Evil, et ce sur leurs supports d’origine. En parallèle, des membres de l’association complètent les accompagnements pédagogiques en échangeant directement auprès du public.

Au total, ce sont environ 120 machines jouables mises à disposition, soit autant de jeux d’époques et de genres différents. À ce titre, il est à noter qu’à de très rares exceptions, elles sont toutes à hauteur d’enfant et accessibles aux PMR.
La muséographie, travaillée et originale, permet aux visiteuses et visiteurs de se replonger dans l’ambiance des différentes époques abordées, comme à travers la reconstitution d’un salon des années 70 ou de chambres des années 80 et 90, mais aussi des nombreuses publicités qui ont fait rêver des générations de joueuses et joueurs. L’ensemble constitue davantage une ballade au fil de l’histoire du jeu vidéo et des générations qui l’ont enrichie qu’une visite stricte et aseptisée. On se surprend à butiner d’une machine à l’autre, à aller et venir dans les espaces dédiés, à se remémorer d’agréables souvenirs et même à discuter avec des personnes inconnues au détour d’une session de jeu. Cette expérience est par ailleurs complétée par des conférences portant sur divers sujets en lien avec le jeu vidéo, accessibles à toutes et tous dans la limite des places disponibles, ainsi qu’une petite boutique proposant de nombreux ouvrages sur l’histoire du jeu vidéo.

Accessible uniquement sur réservation, le Musée du Jeu Vidéo propose des tarifs pour tous les publics. À noter que ces réservations se font sur des créneaux horaires définis. Le musée ouvre également ses portes aux groupes scolaires, pour lesquels il organisera sa première visite en janvier 2026.
En somme, un beau projet qui, après plus de deux décennies de gestation, a enfin vu le jour malgré de nombreux défis à relever. Et si d’autres l’ont précédé sans pour autant perdurer, il y a fort à parier que l’expérience, les compétences et les soutiens dont bénéficie MO5 permettront au Musée du Jeu Vidéo de continuer à nous émerveiller et à faire vivre les dimensions culturelles et pédagogiques d’un média qui, doucement mais sûrement, fêtera son premier siècle un jour pas si lointain.





























