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Foretales

billou95 par billou95,  email  @billou_95
Développeur / Editeur : Alkemi Games Dear Villagers
Supports : PC / Switch
Entre les sorties qui se télescopent et l'avalanche de deck builders de tous poils qui nous promettent monts et merveilles à grand renfort de "révolution du genre" et de "mélange audacieux", difficile de se monter le deck ultime (NdCBL : astique-le ?). On parle ici de celui qui ravira à la fois les amateurs de mécaniques de jeux originales, mais également d'histoires piquantes à suivre au gré de la pioche.
Et c'est sans trembler face aux ténors du barreau, j'ai nommé Hand of Fate, Inscryption et autre Griftlands (déjà chroniqué par Rozzo dans nos colonnes) que viennent s'incruster les sablés bretons d'Alkemi. Déjà adepte du rogue avec leur shmup Drifting Lands, ils récidivent avec leur dernière production qui joue cette fois-ci à fond la carte (hoho) du narratif, jugez plutôt. Prince des voleurs des bas quartiers, la corneille Volepain n'en est pas à son premier méfait. Mais il l'assure à son partenaire de crime Léo (un tigre à la mine patibulaire mais presque), cette fois-ci c'est le plan du siècle ! Celui qui leur permettra de prendre une retraite bien méritée. Le coup est d'une insolente simplicité, s'introduire dans le manoir d'une chauve-souris peu recommandable à la tombée de la nuit et lui chiper sa lyre magique. Sauf qu'évidemment à peine l'instrument dérobé, l'affaire tourne au vinaigre et nos deux héros se retrouvent à courir après une apocalypse qui semble écrite d'avance et qui se révèle à Volepain au travers de visions catastrophiques.

Rajoutez à ça une ribambelle de personnages anthropomorphes comme une matrone éléphante bavarde ou un mineur orang-outan syndiqué, et un univers médiéval à tendance fantastique assez étoffé avec ses castes et ses mystères.



Vous le sentez venir, le quota narration cocasse de notre deck de rêve ? La direction artistique de Foretales ne gâche rien à l'histoire : avec ses très nombreux artworks façon Robin des Bois Disney et des fonds de table de jeu qui vont de pair avec les lieux traversés (à l'ombre du feuillage des arbres dans une forêt, éclairé par le soleil au rythme du roulis d'un navire sur les flots en pleine mer), l'ensemble est charmant juste ce qu'il faut pour nous mettre dans l'ambiance.

Et puis le jeu est délicieusement accompagné par une bande originale signée Christophe Héral (Beyond Good & Evil 1 et 2, Rayman Origins) et Raphaël Joffres (Beyond Good & Evil 2) qui nous reste immanquablement en tête bien des heures après notre dernière pioche. Clou du spectacle, c'est le facétieux Travis Willingham de Critical Role qui narre les récits de nos zéros, toujours avec une pointe d'humour. Un humour qui détonne dans les dialogues du jeu. Pour tout vous dire, cela faisait longtemps qu'on n'avait pas vu des dialogues aussi joliment écrits dans un jeu vidéo. Enfin bref, le pari de l'aventure audiovisuelle est déjà réussi. Mais il reste encore à valider ses mécaniques qu'on nous promet là aussi innovantes...

Pour aller de pair avec ses volontés narratrices, Foretales s'éloigne en effet quelque peu du deck building traditionnel. Voyez le plutôt comme un Livre Dont Vous Etes le Héros. La campagne du jeu est divisée en missions. Chaque mission propose une succession de phases d'exploration dans différentes régions (une région = un objectif à accomplir). En début de partie, plusieurs cartes piochées depuis le deck de lieux sont disposées sur la table. A chaque fois que vous allez effectuer une action sur l'une de ces cartes avec l'un de vos héros, vous allez pouvoir au choix repiocher et déposer une nouvelle carte lieu par-dessus, récolter des ressources, récupérer des objets ou bien piocher et déposer une carte PNJ par dessus. Et ainsi de suite. A côté de vos héros, vous retrouvez vos ressources et également des cartes action en main et dans une pioche en dessous de chaque héros. Ces cartes actions déclenchent des "pouvoirs" spéciaux qui modifient les interactions avec les lieux et PNJs. Par exemple, notre guigne de Volepain pourra utiliser ses talents de roublard pour dérober des trésors ou épier les conversations des uns et des autres. Isabeau l'éléphante est elle experte en négociation. D'autres animaux eux sont plus portés sur la baston.



D'ailleurs, on nous annonçait une résolution des combats peu banale et là aussi, les français font mouche. Au cours de notre exploration (et donc de notre pioche de lieux), il arrivera qu'on attire des ennemis piochés aléatoirement dans le deck de recherche. Le pack d'ennemis ainsi pioché apparaît au-dessus de la dernière carte posée sur la table. Avant de déclencher un combat, on peut jeter un oeil à ce qui nous attend histoire de nous préparer en avance. Si on a encore de la marge, on peut poursuivre l'exploration via d'autres cartes lieux et ainsi amasser des ressources comme de la nourriture ou de l'or qui permettra de se soigner ou pourquoi pas d'acheter divers objets. Mais on acquiert également de la gloire voire de l'infamie en fonction de nos actions (on récupère par exemple de la gloire en donnant à manger aux pauvres dans les rues). Une fois un combat débuté par contre, on entre dans une phase dite de négociation. Ici on peut utiliser les ressources aquises pour soudoyer ou intimider les méchants. Dans le coin supérieur droit de la zone de combat, on retrouve la jauge de moral du groupe. Abaissez-là à zéro et vous obtenez immédiatement la victoire. Malin !

En faisant baisser les jauges de moral individuelles, on peut donc s'arranger pour terminer un combat sans avoir à dégainer ses armes. Mieux encore, tous les ennemis qui prennent la fuite nous octroient des points de gloire supplémentaires. C'est en usant et abusant de ce système qu'on arrivera au bout de Foretales. Surtout que le jeu se corse rapidement et les ressources qu'on pouvait farmer en boucle au début du jeu se tarissent petit à petit. On apprend donc les ficelles du jeu et certains par coeur qui permettent de dépenser 2x telle ressource pour gagner 3x une autre. Etc. Pour éviter un maximum de combats, on pourra également jouer sur le deck de recherche en y supprimant des créatures via certaines cartes actions.

Ainsi, Foretales dévoile petit à petit son éventail de combinaisons possibles, jusqu'à l'accomplissement des objectifs qui se fait souvent de plusieurs manières différentes. En cela, il nous fait beaucoup penser à l'excellent jeu de cartes/plateau coopératif The 7th Continent. On a véritablement l'impression de pouvoir tordre les mécaniques de jeu à notre convenance et c'est assez jubilatoire. Seule règle immuable, le nombre de cartes actions qui se tarit au fur et à mesure et entrave notre progression.



Aussi, il faudra de temps en temps utiliser le deck de repos pour regagner jusqu'à 3 cartes actions par héros. Et ce deck de repos a un nombre limité de cartes qui vont infliger de plus en plus de malus aux acolytes, jusqu'au game over fatal (ou presque, puisque le jeu sauvegarde quand même entre chaque mission). On peut donc mourir là aussi sans avoir jamais sorti sa lame. Mais ce n'est pas tout, et c'est là qu'est hélas la mauvaise pioche dans le jeu. En avançant dans l'histoire, on va faire de nombreux choix qui façonnent une simili-route à embranchements semblable à celle qu'on parcourt dans un grand nombre de rogues. Sauf que dans Foretales, on peut subir un game over sans avoir été averti que nos choix allaient nous mener irrémédiablement vers un second run. Progressivement, notre bande de héros à poils et à plumes subit des calamités qui sévissent autour d'eux sans qu'ils puissent y faire grand chose. En tout cas, c'est ce qu'on nous fait comprendre dans le scénario et dans les dialogues. Mais on se retrouve au bout de 8h devant un mur scénaristique nous obligeant à repartir de zéro pour un autre run. Pour raccrocher les wagons, la pirouette narrative fumeuse nous parle de dimensions aux Volepain alternatifs. Mouais, c'est surtout la non-justification de mécaniques rogues qui n'avait selon nous pas vraiment leur place dans un jeu qui se veut narratif.

A la manière d'un Telltale, on aurait préféré que Foretales se termine bien ou mal selon nos choix, mais qu'on ne nous oblige pas arbitrairement de devoir tout refaire en choisissant d'autres embranchements pour espérer trouver cette fois-ci la bonne voie dans le labyrinthe scénaristique du jeu. Surtout qu'aucun indice ne nous guide clairement vers la bonne fin. Il faut quelque part apprendre le jeu par coeur, à ses dépens.

Arrivé à la fin du second run après encore 7h de jeu, je me demande à chaque nouvelle mission si on ne va pas à nouveau me mettre un gros stop des familles. Pour couronner le tout, il arrive plus d'une fois qu'on se retrouve bloqué à la recherche de la combinaison de cartes qui permet de se débloquer et d'avancer à la prochaine région. Et ça peut durer des heures avant qu'on ait l'éclair de génie et qu'on retombe sur la bonne carte dans la pioche. C'est dommage car ces périodes de frustration arrivent beaucoup plus souvent sur la fin du jeu et elles cassent pas mal cette impression de liberté qui accompagne les 2/3 de la campagne.

On l'aime bien le petit Foretales, mais ça nous empêche pas de pester sur ses travers. Une histoire passionnante, des dialogues finement ciselés, des mécaniques de jeu vraiment bien imbriquées, pas de doute le jeu est vraiment bourré de qualités. Mais notre passion pour le dernier né d'Alkemi survivra-t-elle à un énième run imposé ? C'est toute la question qu'on se pose. Si vous n'êtes pas du genre à être écoeuré aux moindre relents de rogue, vous pouvez foncer l'acheter les yeux fermés. Si par contre, vous recherchez un jeu de carte narratif point barre, vous risquez d'avoir comme nous les dents qui grincent plus d'une fois avant la fin.

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