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Un Rédacteur Factornews vous demande :

ACTU

Post mortem Hell Yeah!, un développement infernal

Joule par Joule,  email  @j0ule  
 
Une des conférences que nous attendions avec impatience lors de la dernière Game Connection était sans aucun doute le post mortem d’Hell Yeah! Wrath of the Dead Rabbit réalisé par son directeur créatif et artistique, Aurélien Regard.

Retour sur un développement chaotique auquel Arkedo Studio n’était pas forcément préparé.

"On s’était préparé au pire. On a eu droit à pire que pire". Voila un petit résumé du ressenti d’Aurélien à la sortie de sa conférence, principalement axée sur la partie artistique du jeu, première production d’envergure moyenne pour un studio plutôt habitué au travail en équipe très restreinte (les Arkedo Series, Big Bang Mini, Nervous Brickdown).

D’ailleurs, au départ, le proto de Hell Yeah! part plutôt sur un jeu simple qui aurait pu se greffer dans les Arkedo Series. Le concept est inspiré du jeu iPhone I Dig It, qu’il faut agrémenter à la sauce Arkedo, à savoir du gameplay arcade et des monstres improbables. Pour conserver un côté cartoon et mignon, il est donc décidé que le héros serait un lapin blanc, dont seul les amateurs des Monthy Python pourraient connaître la violence.
 


C’est donc au départ un sandbox tout moche avec un driller, que le studio va égayer un peu histoire de présenter le proto aux éditeurs, sait-on jamais. Un storyboard de la démo est gribouillé, un bon gros coup de polish cartoon est donné, une structure à la Metroïdvania est imaginée et une histoire loufoque est écrite. Manque de bol pour cette dernière, le scénar est quasiment bouclé quand le studio se rend compte que celui-ci est trop proche de celui de DeathSpank, avec en commun une histoire de slip suprême.
 


Une fois ce contretemps oublié, la valse des présentations aux éditeurs est entamée. Beaucoup sont intéressés, et c’est finalement Sega qui se montre le plus convaincant, offrant un joli budget et une liberté artistique assez conséquente. Pourtant, Arkedo a commis quelques erreurs qui font que Hell Yeah!, même s’ils en sont fiers, aurait pu être mieux à leur goût.

L’idée de faire un bestiaire improbable, déjanté et conséquent avait tout pour plaire, vu que cela avait le mérite de surprendre constamment le joueur et de laisser tout liberté artistique aux designers sans véritable contrainte réelle. Le revers de la médaille fut un temps considérable à produire toutes les ressources nécessaires, notamment les anims qui ne pouvaient que très peu être réutilisées. Pour conserver ce choix, Arkedo aurait peut-être dû limiter le bestiaire en nombre.
 


Autre petit souci : à vouloir faire le jeu directement en anglais, et à vouloir inclure plein de blagues dedans, le studio n’étant pas avare en vannes pourries, ils se sont heurtés au fait que leur humour n’est peut-être pas english friendly. Beaucoup tombaient à plat, et d’autres carrément étaient carrément incompréhensibles. Il a donc fallu faire appel à quelqu'un d'externe pour retravailler l'ensemble et peaufiner le tout, avec un résultat final plutôt satisfaisant même peut-être un peu de temps perdu vu la méthode.

Mais de l’aveu même d’Aurélien, la plus grosse erreur vient de sa part. Il n’a pas su déléguer comme il faut la masse incroyable de boulot qu’il fallait abattre. Habitué à gérer et réaliser le game design, level design et les graphismes quasiment tout seul sur de petites prods, il n’a pas géré la transition pour manager une équipe. En bon dictateur, il a essayé de faire bosser avec son style si particulier les intervenants internes et externes, au lieu de simplement laisser s’exprimer leur créativité. Le résultat a souvent été décevant, comme en témoigne cet aperçu du premier teaser du jeu, que le sous-traitant proposait initialement de faire en 3D.
 


Aurélien prenant du retard à tout vouloir gérer, ce qui instaura un climat tendu et une relative perte de confiance entre lui et les équipes, il a été tenté une autre technique pour l’introduction du jeu : Aurélien dessine en noir et blanc et refourgue le bébé à un autre artiste pour mettre en couleur et animer, sans réellement le briefer plus que ça. Le résultat là non plus n’a pas été à la hauteur des espérances. Finalement, c’est quand ils ont laissé s’exprimer un stagiaire avec son propre style qu’ils ont obtenu le plus satisfaction.
 


Au rayon des satisfactions, et il y en a quand même eu, faut pas déconner, le process de créa a mis du temps à se mettre en place, notamment pour s’adapter aux outils, mais s’est révélé efficace. Pour le level design, chaque niveau a été drafté à l’arrache en 2D, puis transformé en véritable level avec des placeholders et enfin décoré par Aurélien, qui pouvait apporter sa touche en fin de process.

Pour la création de personnages, si l’artwork papier c’est cool et ça permet aux artistes de se faire plaisir, au final ça ne sert pas à grand chose. Il a donc été décidé de créer et dessiner directement sur Flash, permettant ainsi d’accélérer le process avec les outils du logiciel comme les instances, et d’avoir directement un fichier exportable dans le jeu. Cela a permis de sauter un paquet d’étapes et ainsi de gagner du temps précieux.

Car au final, il en a manqué, puisque le jeu était amputé de deux mondes complets et d’un mode de jeu lorsque le développement était supposé arriver à son terme. Seulement, là où il est possible de procéder à des coupes drastiques lorsque l’on s’autoproduit sur un petit projet, c’est plus difficile à faire passer lorsque l’on a un éditeur en face, avec un cahier des charges bien défini pour lequel il a payé. Toutefois, Arkedo s’est senti préservé de la pression de l’éditeur, avec qui ça s’est plutôt bien passé, comme en témoigne le consensus sur la jaquette du jeu. A la limite, de l’aveu d’Aurélien, c’est peut-être Arkedo qui s’est mis la pression un peu tout seul à trop vouloir faire le jeu ultime, rêve de toute une équipe. Ce trop plein de stress a nuit à ce qui fait le bonheur des développeurs indé : "le fun de la création".
 


On finira ce post mortem avec quelques petits conseils pour développeurs indépendants. Tout d’abord, faire très attention aux premiers assets graphiques qu’on envoie à la presse lorsque l’on dévoile le jeu. Ils se retrouvent très vite en première page de Google Images et sont apparemment condamnés à y rester. Pour peu qu’ils aient été faits à l’arrache et ne soient pas très représentatifs du boulot final, cela peut nuire à l’image du jeu.

Autre petit conseil qui tient à coeur à Aurélien, c’est de ne pas se focaliser uniquement sur les critiques et les mauvaises reviews, mais plutôt de profiter des retours positifs et de tout l’amour que les joueurs peuvent témoigner, que ce soit dans les salons ou sur internet. Voici quelques fanarts et un exemple de vidéo qui ont redonné du baume au coeur à toute l’équipe.
 
 
Fan video


En guise de conclusion, Arkedo a fini son projet sur les rotules et prend un peu le temps de s’en remettre. Cela leur permet aussi d’avancer sur le projet de maison du bonheur Nice Guys. Sauf grande surprise, il est plutôt prévu de retourner sur de petites productions, plus lisibles et plus faciles à contrôler. Le prochain titre à venir, dont voici la première image, va en tout cas dans ce sens.

Signalons qu'Aurélien a mis directement son post portem en anglais sur son blog. Les intéressés peuvent aller voir cette lecture complémentaire à cette adresse.
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