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Knights And Bikes, fouille sentimentale

billou95 par billou95,  email  @billou_95
Développeur / Editeur : Double Fine Foam Sword Games
Supports : PC / PS4
L'un est le fier papa de Tearaway, l'autre programmeur du génialissime LittleBigPlanet, tous deux transfuges d'un Media Molecule à l'aube de méchantes remises en question interne : Rex Crowle et Moo Yu montent Foam Sword Games fin 2015 avec l'envie de faire du jeu vidéo doudou, celui qu'ils affectionnaient bricoler façon DIY chez leur ancien employeur. Alors il ne leur faut pas longtemps pour s'accorder sur ce que sera leur nouvelle création 100% papier recyclé : inspiré par les anciennes gloires 16bits (dont Earthbound) et le cultissime film Les Goonies, le projet Knights And Bikes se lance après un Kickstarter réussi début 2016. 3 ans et demi plus tard, il est temps de dégripper nos BMXs et de partir à la chasse au trésor !
Knights And Bikes c'est avant tout les tribulations du Penfurzy Rebel Bicycle Club, un duo de fillettes (et une oie) livrées à elles-mêmes sur une petite île perdue au large de la Cornouaille. Dès les premiers instants, on sent l'empreinte du chef d'oeuvre de Richard Donner. Eté 1987, c'est déjà la fin des vacances sur Penfurzy Island. La beauté sauvage de ce gros caillou planté dans l'océan a laissé place au balayage continuel d'une végétation automnale ; ces vents ne rabattant hélas plus les ferries bourrés de touristes sur ses côtes. Pendant que les grandes personnes se préparent à affronter la rude saison hivernale, les enfants vaquent à leurs occupations préférées : faire du vélo et s'inventer des histoires. Et c'est lors d'un passage au village portuaire avec son père que la tumultueuse Demelza fait la connaissance d'une très réservée Nessa. Deux filles que tout oppose sur le papier et qui vont vivre ensemble une semaine riche en aventures ! Demelza c'est cette petite rousse ébouriffée avec deux immenses couettes et une salopette en jean. Encore affectée par le décès récent de sa maman, elle fait tout pour cacher cette faiblesse en se raccrochant à ses "trucs" (comics, jeux vidéo, figurines) lorsque le blues se pointe à l'horizon.

Débordant d'imagination, elle voit des créatures fantastiques, des mystères et des trésors partout où elle tourne la tête. Nessa quant à elle, c'est la Punky Brewster de la bande. Un poil plus âgée, plus rationnelle mais aussi plus rock ‘n’ roll que Demelza, la demoiselle, fraichement débarquée sur l'île après une fugue, va se lier d'amitié avec l'extravagante petite anglaise et par la même occasion accepter progressivement de lâcher prise sur ses problèmes existentiels d'adolescente. Et cette amitié va être scellée par un évènement aussi inattendu qu'improbable (enfin pas tellement si vous avez déjà vu Les Goonies, sinon vous attendez quoi ?!), la découverte d'un avis d'expropriation au hasard d'une balade sur le mini-golf du paternel de la rouquine. Après quelques rebondissements, c'est une Demelza furieuse qui décide d'agir sans consulter papa et de défoncer la pelleteuse du futur propriétaire qui venait tranquillement sonder son futur terrain. Malheureusement, ce faisant, elles libèrent des âmes damnées sur l'île, ce qui va légèrement compliquer leurs pérégrinations... A partir de là, elles décident de partir en chasse du légendaire trésor des chevaliers de Penfurzy qui serait caché quelques part sur l'archipel et permettrait de sauver le parcours de golf et le camping familial d'Avalons Peak.

Memento Morue

Ensemble et pendant 6 jours, elles vont battre la campagne et traverser 1000 épreuves (au moins, à cet âge on ne sait pas compter jusque-là mais ça fait vachement plus impressionnant dit comme ça !) pour espérer retrouver le précieux, sans oublier de revenir dormir à la maison à la nuit tombée, pas folles les guêpes. C'est dans un monde semi-ouvert que l'on va explorer les environs à pied ou à bicyclette, toujours en compagnie de Captain Honkers, une oie au flair imparable domestiquée par Demelza, mais aussi un peu plus tard de la tête d'un croisé mort-vivant. Et l'îlot a beau paraître tout petit, il regorge de lieux à visiter : la boutique de vélos du coin, un genre de Bibliobus itinérant, le parc d'attractions à peine glauque de Piskie Park, The Treasured Bunker : moitié golf moitié musée cheapos, la casse des Talskidy Brothers, etc. Le jeu possède aussi de nombreux seconds rôles rigolos comme une disquaire punk, un énigmatique potier et la libraire qui finiront tous possédés. A chaque réveil, les filles vont partir dans de nouvelles quêtes et affronter de nouveaux dangers dont leurs propres démons intérieurs dans un gameplay action-aventure très orienté coopératif (en local ou en ligne, mais parfaitement jouable en solo avec l'IA) entre Zelda et Secret of Mana. De puzzles légers à résoudre en groupe jusqu'à des arènes pleines d'objets animés par les âmes maudites disséminées sur l'île, Dem et Nes vont clairement passer les meilleures vacances de leur vie !

Avant même de s'attarder sur la direction artistique du titre ou son gameplay finalement accessoire, ce qui frappe tout d'abord le quadra grommelant en moi que c'était mieux avant, c'est tous les souvenirs d'une jeunesse vécue coincé au fin fond de mon Gers natal qui sont exhumés par le jeu. Et je ne parle même pas du travail de recherche autour de la culture des années 80 : les fringues des personnages, le vieux téléphone transportable, les VHS dont Kiddoes : ce ripoff amical de The Goonies, les K7 audio, etc. Au-delà de ça, c'est vraiment cette célébration des étés interminables de l'époque où la seule question qui nous venait en tête le matin devant les tartines et le bol de Poulain c'était "OK qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire aujourd'hui ?" suivi immédiatement par un "Ben on a qu'à prendre les vélos et on verra !!". Jouer à Knights and Bikes me rappelle ces journées entières passées dans les coteaux avec des "meilleurs potes" perdus de vue depuis, nos BMXs bricolés avec un bout de carton qui frotte sur la roue arrière pour faire le bruit d'une Mobylette (eh oh on l'a tous fait hein), de ces chroniques épiques imaginées instantanément à l'orée d'un bois qui nous semblait vaguement lugubre, de tout ce qui faisait vibrer notre matière grise étant gosses. Je me retrouve un peu dans cette Demelza à l'imagination incroyable qui lui fait voir ici un terrain de foot, des monstres innommables (la pelleteuse de Verk, la presse à voiture de la casse), là le souffle d'un dragon gigantesque (le vent dans la montagne).



Toutes ces pensées farfelues sont représentées grossièrement en filagramme par-dessus les objets. Malin. Vient donc évidemment après l'émerveillement le look du jeu qui fait son petit effet, bien qu'il rappelle les dernières oeuvres de ses créateurs du temps où ils bossaient pour le sbire du grand manitou Sony. Dans un monde dessiné à la main ou tout ce qui bouge est un bout de papier collé dans l'environnement, des détails fourmillent à chaque instant dans tous les recoins de l'écran. Les traits enfantins volontairement accentués de tout le casting du jeu (mais surtout l'adorable Demelza), la palette de couleurs automnales aux tons tristes crayonnées avec soin et des objets aussi anguleux et biscornus que ceux qui remplissent les peintures d'une célébrité locale de Cornouaille du XIXe siècle dont s'est inspiré Rex : tout contribue au merveilleux de Knights And Bikes et le joueur attentif en aura vraiment pour son argent avec cette direction artistique charmante, à défaut d'être totalement originale. Côté gameplay, là aussi pas de réelle prise de risque, les développeurs réutilisant ce qui faisait déjà recette sur la Super Nintendo. En sus de la course et des roulades, chacune des deux héroïnes possèdera jusqu'à 3 compétences uniques : des boots de pluie idéales pour flique-flaquer au sol et mettre des coups de petous au Power Glove non officiel permettant de devenir invisible et d'électrifier des objets en passant par un Boombox d'époque dont les watts feront temporairement déguerpir les nuées d'âmes maudites.

Cyclos tous risques

Coopération un jour, coopération toujours. Le jeu use de la combinaison d'actions à outrance. Dem peut par exemple renvoyer le Frisbee de Nes à l'aide d'un coup de pied et ainsi lui faire gagner en allonge. Les ennemis profitent également de ces mécaniques, certains étant équipés de boucliers qu'il faudra d'abord casser à l'aide de l'une ou l'autre des petits bouchons. Les puzzles seront eux prétexte à réaliser des actions à plusieurs (marcher sur 2 interrupteurs différents pour ouvrir une grille, envoyer des ballons d'eau pour servir de conducteur électrique avec Nes pendant que Dem joue les électriciennes avec son gant, etc.). En bonus, le jeu n'est pas avare en mini-jeux improvisés de type cross-country en vélo, course au jouet, rembobinage de cassette, préparation des scones anglais et autres, qui fonctionnent très bien en coop et n'offrent rien de plus comme récompense que le plaisir d'avoir battu son adversaire, comme des petites pauses défis dans cette aventure presqu'exclusivement amicale. Enfin, le fidèle destrier d'acier des gamines peut se voir mis à jour à l'aide des babioles récupérée au fil du jeu. Si les flat-tires et le booster de vitesse sont indispensables à la poursuite du scénario, tout le reste est juste cosmétique, des fanions tête de mort aux protections de cadre fluo en polystyrène. Classe !



L'ambiance sonore du jeu est elle étonnamment minimaliste. Outre l'entrainant thème principal composé par Daniel Pemberton (Spiderman: Enter The Spiderverse) qui revient plusieurs fois dans des orchestrations différentes, la partie son tourne autour des bruits d'oiseaux et des vents marins qui balayent l'île au quotidien. Enfin, oui ça mais aussi les "haeuuuum brrrr vroom hiii" des filles quand elles courent comme des dératés imitant les poursuites automobiles des films. Si la technique est globalement satisfaisante, quelques problèmes de clipping notamment dans la ville portuaire de Penfurzy, viennent rappeler qu'on est là devant une toute petite production. Le pathfinding de l'IA fait aussi un peu des siennes sur les chemins trop sinueux à angles droits, mais comme on peut switcher de personnage à la volée, ce n'est pas handicapant. Enfin, il fallait s'y attendre avec un titre dessiné à la main et difficile d'en vouloir au studio, mais les zooms sur les estampes à certains moments clés de l'histoire peuvent paraitre un peu fades en résolutions supérieures au 1080p, échelle standard utilisée lors du processus de création des assets.

Véritable machine à remonter le temps et à triturer nos souvenirs, Knights And Bikes capture plus qu'une époque, il arrive à mettre en exergue ces bonheurs simples de notre enfance, ces étés infinis passés avec ceux qu'on aimait autour de tout et rien. Une période de conquête de l'adolescence pour les jeunes que nous étions certes, mais aussi liée à la secrète envie de continuer à rêver. C'est de toute façon clairement le leitmotiv du jeu, nous faire comprendre que ça ne fait pas de mal de se poser et de rêvasser un peu de temps à autres, qu'on ait 12 ans 3/4 ou une trentaine d'années supplémentaires.

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