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Un Rédacteur Factornews vous demande :

 
TEST

Amnesia: Rebirth, mais pas trop

Rozzo par Rozzo,  email
Développeur / Editeur : Frictional Games
Support : PC
Dire que SOMA, le précédent jeu de Frictional Games nous avait convaincus est un euphémisme. Qu’importe son gameplay un peu vieillissant, et qu’importe sa technique datée, sa grande force résidait ailleurs : dans sa narration. Alors forcément, lorsqu’Amnesia: Rebirth a déboulé, on en attendait beaucoup. Peut-être trop…
Il faut dire que chez Frictional, il y a déjà des années qu'on a compris quelque chose que les autres peinaient à concevoir autrefois : la notion d’un jeu d’horreur dans lequel le joueur, privé d’outils devrait non pas affronter les monstres, mais les esquiver. Une idée qui depuis a fait le tour de l’industrie, allant jusqu’à influencer notre saga de zombie préférée. Avec The Dark Descent, premier opus maintenant devenu culte, et sa suite A Machine for Pigs un peu moins considérée (car développée par The Chinese Room), c’est toute la licence Amnesia et par extension Penumbra avec laquelle elle partage beaucoup de similitudes qui est un sceau de qualité d’une certaine représentation du jeu d’horreur. Qu’on l’aime ou non, cette formule repose sur des fondations qui ne changent pas, ou très peu. 

Solfège de la peur

On y retrouve tout d’abord un personnage amnésique, qui se réveille avec une gueule de bois de l’espace. Difficile de critiquer là-dessus un jeu, quand ce concept est dans son titre. Autre atout de la formule, un gameplay particulier hérité de Penumbra, fait d’interactions à base de tenir/relâcher. Pour ouvrir une porte, il faut la saisir et la tirer à nous. Certaines énigmes, et elles sont nombreuses, nous imposent d’utiliser la physique pour soulever des choses, et les reposer ailleurs. Si l’idée était novatrice à l’époque, on commence à en avoir un peu trop l’habitude. Et comme on va le voir, ce sentiment de « déjà joué » va courir sur toute l’expérience.



Autre caractéristique, une systémisation de la peur, marquée par une sorte de timer qui s’enclenche lorsque notre personnage est dans le noir ou sous pression, et qui, si on ne trouve pas une source de lumière, finit par le rendre fou. Il y a sujet à débat, l’idée ayant ses défenseurs et ses détracteurs. Au fil des jeux, parfois elle est présente, comme ici, mais elle brille par son absence dans A Machine for Pigs. De notre côté, on trouve le concept un peu factice et on se range du côté de ceux qui pensent que la frayeur n’a pas besoin d’être symbolisée, mais ressentie. 

Enfin, un manque d’outil contre le mal que l’on affronte : pas d’épée, de pistolet, de cutter plasma (NDLR : Dead Space mon amour). Il n’y a que vous, votre cerveau, une lampe à huile et une poignée d’allumettes. Pourquoi avoir rappelé tout ça ? Parce que tout le gameplay, ou presque, de Amnesia: Rebirth est repris de ce « canon »… Et qu’on aurait bien aimé un peu d’air frais dans les cryptes.

Comme une odeur de Naphtaline

Si au début on est heureux de retrouver ses petits et cette maniabilité mi-immersive, mi-lourde, on est quand même en droit de s’attendre à des nouveautés. Malheureusement, elles sont toutes trop timides pour nous tenir en haleine. Le problème, c’est que ce qui fonctionnait il y a cinq ans paraît redondant maintenant. On a parlé plus haut de la mécanique de peur, mais sans parler d’elle, le coup des allumettes pour s’éclairer est une idée qui tourne sérieusement en rond. Littéralement au nombre de dix maximum, et avec une durée de vie de quatre secondes à tout péter, on passe l’aventure à se déplacer promptement de torches murales en bougies posées. Et que dire de la lanterne qui pleine tient à peine soixante secondes ?

Pour donner des particules de nouveauté à un gameplay que l’on est en droit de trouver quand même poussiéreux, le jeu nous met entre les mains rapidement une boussole qui permet de changer de dimension. Rien que ça. Alors très vite, notre cerveau s’emballe et s’imagine que Frictonnal est allé s’inspirer de ces niveaux incroyables de « La Déchirure » dans Dishonored 2, ou encore Le Laboratoire de Titanfall 2. Il n’en est rien : si sur le papier l’idée a de quoi séduire, son usage se fera dans des points décidés par le jeu. La boussole restera un gimmick narratif plus qu’une mécanique. Dommage, on aurait adoré pouvoir se faire courser par des monstres interdimensionnels. 



Rien de bien neuf non plus à chercher du côté des casse-tête, qui sont à l’image de la série. Pas forcément difficiles, mais parfois inutilement complexes. Pour le coup, si certains sont plutôt déjà vus (les temples, ce « baril rouge » de l’énigme dans le jeu vidéo), d’autres surprennent par leur ambiance. On repense notamment à cette grenade attachée à une porte et dont on doit éviter le fil, avant de s’en emparer sans la lâcher. Bref, globalement, le gameplay reste bien trop alourdi par son héritage pour convaincre à nouveau. Mais entre nous, on est prêt à pardonner beaucoup à Frictional si l’histoire qu’ils nous racontent nous emporte.

Souviens-toi l’été dernier

Rebirth nous rejoue donc, comme on l’a dit, la partition de l’amnésie-mais-avec-flashback. On incarne Tasi Trianon, une Française (cocorico ! Dommage que son accent anglais soit aussi marqué en VO…), qui se réveille après un crash d’avion au milieu du désert africain. Toute son équipe a disparu et pire encore, son mari, Salim, est introuvable. S’entame alors un jeu de piste à travers le vide et les dimensions pour retrouver nos camarades… et comme dans le premier volet d'Amnesia, notre pauvre Tasi va bien vite se rendre compte qu’elle a précédemment vécu les choses et les horreurs auxquelles elle assiste. 



C’est sur cette base que le titre va peu à peu construire une narration qui tourne autour de la maternité, du sacrifice, de l’amour. Et, dans un premier temps, ça fonctionne à merveille. On découvre par flashbacks les gens de l’équipe, les moments d’intimité passés à Paris avec notre mari et notre fille… jusqu’à ce que le goût de déjà joué revienne. On va bien se garder d’en raconter plus (l’expérience de ce genre de jeu dépend en grande partie de la narration), mais là où SOMA parvenait à se montrer haletant, rebattant sans cesse les cartes de notre compréhension, avec un final doux-amer dont on porte encore les séquelles, Amnesia: Rebirth rate le coche. On regrettera également que le jeu ne nous offre aucun dilemme moral comme SOMA (encore lui !) avait pu proposer. Tout au plus le joueur pourra choisir comment terminer l'histoire dans les quinze dernières minutes. Chacun se fera son avis, mais là où l’on conseille les yeux fermés le précédent de par l’universalité de son propos, le petit dernier des vikings prend une direction qui risque d’en laisser plus d’un sur le côté. 

L’éloge de la Flippe

La peur, dans tout ça, arrive heureusement à trouver son chemin. Si les monstres que l’on affronte sont moins nombreux qu’auparavant, le travail sur l’ambiance témoigne d’un savoir-faire indéniable. Que cela soit dans le monde réel ou dans l’autre dimension, le jeu parvient à poser sur nous une chappe de plomb dont les quelques instants calmes agissent en bouffée d’oxygène. Et lorsque ce n’est pas la peur qui nous habite, un profond malaise est toujours présent dans les murs. Même s’ils sont scriptés jusqu’à la moelle, les moments de course poursuite fonctionnent très bien et on se surprend à faire pause le temps de reprendre son souffle. Dommage que les « affrontements » ne soient pas au diapason : ces moments d’esquive des monstres, novateurs à la sortie du premier, mais maintenant tellement vus et revus sonnent un brin creux et penchent un peu trop vers le die and retry. Sur la fin, on se contente de sprinter dans le noir et de voir où ça passe.

Depuis le début de ce test, on a beaucoup évité de parler de la technique. Pourtant, c’est elle qui contribue à donner à tout le titre cette impression de suranné. Si le sound-design et le doublage demeurent de solide qualité, la partie visuelle est loin d’être au diapason. Parfois le jeu nous surprend en nous offrant de très beaux panoramas et un vrai travail d’ambiance. Dommage que le reste peut-être qualifié poliment de « rustique ». Les textures sont en haute résolution, mais c’est l’ensemble de l’ouvrage qui est piégé dans une géométrie coupée à la serpe, anguleux. Les effets visuels tombent souvent à plat et les différences avec SOMA, pourtant sorti en 2015 ne sautent pas aux yeux. Et au final, ça contribue à accroître cette impression persistante d’être présence d’un jeu qui a quatre ans de retard.

Douce ironie que d'appeler Rebirth un jeu autant campé sur ses acquis. Toutefois, on y était allé avec toute la bonne volonté du monde. En tentant le travail d’équilibriste de revenir aux sources de leur saga fétiche, tout en jouant sur les apports narratifs de SOMA, Frictional Games livre un jeu hybride, qui ne réussit ni à renouveler le gameplay canonique de la série ni à reproduire la force évocatrice de leur précédent titre. En résulte un objet vidéoludique clairement identifé qui se laisse apprécier, sans jamais vraiment nous emporter ou nous surprendre. Au bout des huit heures que dure la campagne, on ne nous ôtera pas de l’idée qu’il est grand temps pour les Suédois de remettre les choses à plat et partir dans une direction nouvelle.
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