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ARTICLE

Indiecade Europe 2019

Fougère par Fougère,  email  @JeSuisUneFouger
Comme tous les ans depuis sa création, nous nous sommes déplacés à l’Indiecade. Première nouveauté, le salon qui se tenait jusque-là au CNAM s’est déplacé à la BNF. Ce changement de cadre a été également l’occasion de revoir le déroulé de l’événement, avec des conférences plus courtes et un nouvel espace pour que les développeurs ne faisant pas partie de la sélection officielle puissent montrer leurs travaux.
Pour les 4 du fond qui ne suivent pas, l’Indiecade se présente comme un « salon international des jeux indépendants ». Depuis 2006, le salon se déroule tous les ans outre-Atlantique, et permet au public de découvrir des jeux indés sur place, puis de voter pour son préféré. En gardant le même principe, le festival s’est décliné sous la forme d’une édition européenne qui s’organise en partenariat avec la Paris Games Week depuis 2016. Mais l’Indiecade, c’est aussi l’occasion de tester des jeux qu’on aurait du mal à voir ailleurs, car ils nécessitent une installation ou des équipements un peu particuliers, ou d’assister à des conférences, données par des développeurs indépendants qui viennent partager leurs expériences avec le public. Bref, si vous faites ou que vous vous intéressez de près aux jeux indés, et que vous avez les moyens de vous déplacer jusqu’à l’événement, vous auriez tort de passer à côté.

Pour cette année, la plus grosse différence était bien entendu le nouveau lieu, puisque le salon a pris ses quartiers dans la BNF, la Bibliothèque Nationale de France. Et c’était très très cool. La surface occupée par le salon en lui-même était plus réduite (tous les jeux faisant partie de la sélection étaient rassemblés dans une seule salle), mais le reste du bâtiment étant accessible, le public pouvait se promener et visiter rapidement les lieux entre 2 sessions de jeux. De plus, la BNF avait spécialement ouvert la salle d’études dédiée aux jeux vidéo, pour que les visiteurs puissent venir consulter la collection de l’institution. Un espace Show & Tell a également été mis en place juste à l’entrée, permettant aux étudiants et développeurs indépendants ne faisant pas partie de la sélection officielle du salon d’avoir un espace dédié à la présentation de leurs jeux. Et puis bon, quand vous voyez ce genre de panorama et que vous avez joué à Control il n’y a même pas 3 semaines, difficile de ne pas être impressionné.

Indiecade 2019 : notre sélection


Mais revenons à nos moutons : les jeux & les conférences. Cette année encore, la sélection officielle était un melting pot : les jeux indés déjà sortis et assez ambitieux, comme Unruly Heroes, côtoyaient des projets plus expérimentaux, comme Kind Words, ou des jeux encore en cours de développement, comme Eldest Soul. Un petit tour de la sélection maison.

Blind Spot

Présenté sur tablette Android, Blind Spot attirait immédiatement l’attention en entrant dans la salle qui rassemblait les jeux de la sélection officielle, car tous les joueurs avaient un bandana sur les yeux. En s’approchant, on comprend que le jeu consiste à trouver des cibles invisibles à l’écran en utilisant uniquement les vibrations. En trimballant son index sur la surface de l’appareil, on commence un jeu de chaud-froid tactile, un peu déroutant au début, mais qui rentre rapidement dans les doigts.

Les premiers niveaux sont assez simples, puis le jeu commence à ajouter des cibles, ou à les faire bouger. Comme on doit maintenir son doigt sur chaque cible pour valider un niveau, dès qu’il y en a plus de 2, le jeu se transforme vite en séance de « contorsionisme » manuel. Encore un peu imprécis et parfois un peu frustrant, le jeu a au moins le mérite de proposer quelque chose d’original et d’assez destressant. On imagine facilement réaliser ces petits exercices en guise de relaxation dans son lit, juste avant d’aller piquer un roupillon.

Eldest Souls

En marge de la sélection officielle, on pouvait aller s’énerver un coup sur le stand d’Eldest Souls, un jeu en pixel art qui fait furieusement penser à Dark Souls, mais on pense que vous l’aviez senti venir. La désolation omniprésente de l’environnement, le caractère décrépi de votre personnage, la violence des boss qui vous arrachent la tête en 2 secondes. Pas de doute, on est en terrain connus, même si on est face à un boss-rush plutôt quà ’un véritable action-RPG.

Les dèvs parlent d’un riche système de progression, de secrets, pleins de PNJ, bref, beaucoup de belles choses. La démo permettait de découvrir les 3 premiers boss du jeu, et autant vous dire que ça envoie. Le combat tourne autour d’un système de chargement des attaques qui permet de dasher et de couvrir beaucoup de distance, à quoi s’ajoutent 3 esquives assez généreuses. On se retrouve donc à faire du hit and run avec une épée à 2 mains, et c’est plutôt cool, puisqu’il faut réussir à gérer la vitesse assez lente de votre personnage entre chaque échange avec le Boss. Sans plateforme ni fenêtre de sortie annoncée, on a plus qu’à surveiller le projet de près.

Dubio

Présenté sur Smartphone, Dubio est un petit jeu de plateforme-puzzle minimaliste. Pensez à Chalo Chalo, et vous avez une bonne idée du rendu graphique. Le but est de faire voyager une boule à travers des niveaux, en se servant de la physique et de sa capacité à rebondir pour se déplacer. Une pression pour sauter, une pression maintenue pour transformer la boule en balle qui va rebondir partout.

Comme l’inertie et l’accélération sont « réalistes », échouer un saut est généralement synonyme de game over, entraînant un swipe rapide qui reset le niveau. Simple, rapide, efficace et immédiatement compréhensible, le jeu attirait une petite foule de curieux, avec des développeurs ravis de partager leurs méthodes de développement. En réalisant un outil sur-mesure, ils peuvent générer des niveaux à la volée en utilisant de simple dessin 2D comme matériel de base. Présenté avec déjà plus d’une trentaine de puzzles, avec un twist de gameplay tous les 5-6 niveaux, le jeu promet de longues heures de triturages de méninges une fois sorti.

Ynglet

C’est une tuerie. Mais comme il est impossible de rendre justice aux graphismes et à la bande sonore du jeu avec nos maigres mots, on vous propose de regarder le trailer d’annonce.

Su

Encore un jeu conceptuel. Vous contrôlez un petit personnage, qui va évoluer sur des plateformes qui descendent progressivement dès que vous sautez dessus. Dès que vous avez atterri sur une nouvelle plateforme, celle que vous avez quittée disparaît et est immédiatement remplacée par un autre, qui apparaît aléatoirement sur l’écran.

L’astuce, c’est que des petites runes qui représentent des points à récupérer vont également apparaître de manière aléatoire avec les plateformes. Donc si vous voulez avoir un bon score, il faut réfléchir vite et planifier votre trajet en permanence. Le jeu est rapide, et si on a un peu de mal à rentrer dedans au début, on en arrive rapidement à frénétiquement enchaîner les sauts en essayant de ne pas faire toucher des plateformes avec des points par erreur, ce qui entraîne leurs promptes et définitives disparitions. Quand est-ce que ça s’arrête ? Jamais. Tant que vous arrivez à garder le rythme et que vous ne loupez pas votre saut, vous continuez de jouer.

Les conférences Indiecade 2019

Du côté des conférences, on a également vu pas mal de choses intéressantes. Après qu’une des organisatrices du salon ait prononcé son discours d’ouverture, qui présentait les nouveautés du salon et de l’importance qu’elle attachait au sentiment de communauté que l’Indiecade participait à entretenir, c’est Laura Dilloway qui est venue ouvrir le bal, pour parler de son passage de l’industrie du AAA vers les jeux indés en tant qu’artiste.

Venue de chez Guerilla Games, où elle a travaillé pendant 10 ans sur la série des Killzone en tant qu’artiste environnement, elle saute le pas et passe dans la scène indé en 2017 après avoir rejoint l’équipe de Inkle Studio pour devenir la responsable des environnements sur Heaven’s Vault. Et la transition n’a pas sans péripéties, puisque les processus de production auxquels elle était habituée dans un gros studio de JV, et qui permettaient à des équipes de plusieurs dizaines de personnes de travailler sans se marcher sur les pieds, étaient inexistants, voire même complètement inconnus dans un studio Indé.

Elle a ensuite passé une bonne vingtaine de minutes à utiliser des exemples et des astuces pour assurer un minimum de cohérence et de lisibilité dans un projet, pour fluidifier et simplifier le travail de toutes les personnes concernées. Même si un peu technique sur les bords, son expérience et sa conférence étaient très pédagogiques, et permettaient de démontrer clairement quels aspects de l’industrie du AAA pouvaient être bénéfiques aux structures plus modestes, même aux équipes indés de moins de 10 personnes.



Juste après, on a enchaîné sur une conférence à propos du Dépôt Légal, animé par un des conservateurs de la BNF. Ce processus gratuit, normalement obligatoire, permet à tous les éditeurs de contenu culturel en France de déposer une copie de sa production à la BNF, qui se chargera de le préserver.

Mis en place à l’époque de François Premier, cette obligation est peu connue et souvent ignorée, ce qui fait que la BNF doit embaucher des prospecteurs qui vont se charger de trouver et ramener les éléments nécessaires pour compléter les collections de la BNF. Depuis 2006, le Dépot Légal concerne les œuvres vidéoludiques, mais ce format de contenu culturel pose des challenges particuliers : entre les titres dématérialisés, les consoles rares avec un catalogue restreint ou des jeux qui sont mis à jour pendant plusieurs années comme les MMO, comment assurer la conservation d’un œuvre ?

Malgré ces petites complications, la BNF possède déjà plus de 17 mille jeux conservés dans sa collection, avec des consoles vieilles de plusieurs dizaines d’années encore en état de marche pour les faire tourner. Enfin, les conservateurs encouragent fortement tous les gamers qui souhaitent se débarrasser de leurs jeux trop vieux de les envoyer à la BNF, plutôt que les mettre à la poubelle. Le processus est gratuit, et vous pourriez potentiellement détruire une pièce manquante de cette immense collection.

La conférence suivante était donnée par Nathalie Lawhead, une artiste indépendante ayant participé sur des projets tels que ARMAGAD et Tetrageddon, qui venait parler des abus dans la communauté du jeu vidéo, et plus particulièrement de son expérience après avoir publiquement accusé Jeremy Soule de l’avoir abusé pendant plusieurs années. Faire un compte-rendu exhaustif de son propos serait trop compliqué et probablement trop approximatif pour être pertinent, nous nous contenterons de reformuler une partie de sa conclusion :
Si vous voyez quelqu’un avoir un comportement inapproprié, ou que vous apprenez après coup qu’un abus a eu lieu, ne gardez pas le silence. Coupez les ponts avec une personne toxique ou soutenir la victime n’est pas suffisant, il faut confronter le coupable et lui faire assumer sa responsabilité dans la situation.



Pour terminer, c’est Piotr Bajraszewski, un business manager de 11 bit studios, qui est venu parler du cycle de vie des jeux vidéo, notamment pour les titres indépendants qui sortent sur Steam. Dès le début de sa conférence, il fait clairement comprendre que continuer de faire vivre un jeu sur le long terme a été une des clés du succès des jeux édités par le studio. Pendant sa conférence, en utilisant Frostpunk comme exemple, il explique comment ils ont réussi à maintenir l’intérêt autour du jeu. Tout d’abord en le promouvant à chaque fois qu’ils en avaient l’occasion : streams, hands on, dev update, trailers, etc.
Tous les moyens sont bons pour faire parler du jeu, même de manière indirecte.

Ensuite, ils sont restés à l’écoute de la communauté, à toutes les étapes du développement. Entre les whishlist, le nombre de vues sur un trailer, les précommandes et les médias sociaux, ils se sont efforcés de comprendre ce qu’attendait la communauté. Ils sont également reposés sur les indicateurs venant d’autre projet, que ce soit des concurrents ou pas, pour informer leur propre prise de décisions. Cet ensemble d’infos, une fois proprement analysé et compris, leur permettait de prendre des décisions éclairées et d’itérer sur le projet en étant sûr qu’il gardait le cap qui allait plaire à leur audience.

Mais la principale leçon que Piotr a donnée en fin de conférence était à propos de la monétisation. Et ça se résume simplement à ne soyez pas cupide. À sa sortie, Frostpunk a eu un petit succès, mais le jeu n’est devenu vraiment rentable qu’après 1 an d’exploitation. C’est parce qu’ils ont continué de travailler sur le jeu, d’écouter la communauté et la critique, qu’ils ont utilisé intelligemment les ressources à leurs dispositions et qu’ils n’ont pas essayé d’en extraire le maximum de bénéfices possibles qu’ils ont réussi à en faire un véritable succès critique et financier.

Dernier tip : traduisez votre jeu en chinois. Ils ont fait fureur en Orient dès qu’ils ont mis en ligne la version traduite en Mandarin.
Et voilà le résumé des événements pour l’Indiecade 2019. Comme tous les ans, c’était un plaisir d’être présent sur le salon et le fait de faire ça à la BNF était vraiment la cerise sur le gâteau. Si vous avez envie de passer une paire de journées tranquille, à discuter avec des gens super sympathiques et à jouer à des jeux vidéo que vous ne verrez nulle part ailleurs, vous devriez y faire un tour.
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