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Infamous : Second Son, le retour du fils prodigue?

kimo par kimo,  email
 
On ne peut pas dire que depuis la sortie de la PS4 et de la Xone, les joueurs aient pu vraiment départager les deux constructeurs en termes de jeu. La bataille médiatique s’étant plus faite à coup de chiffres de vente, de performance et de connectivité sociale qu’à l’aide de line-up et d’exclues chocs. La sortie d'une exclusivité grand public est donc un petit évènement pour chaque console. Infamous : Second Son peut-il réussir à faire pencher le cœur des joueurs du côté de chez Sony ?

De grands pouvoirs impliquent avant tout d’avoir l’air cool

Vous incarnez Delvin, jeune délinquant à bonnet rouge d’une bourgade paumée des environs de Seattle, qui se voit accidentellement transmettre des pouvoirs mutagènes lors de l’évasion de trois bio-terroristes. Interrogé lors de l’incident par Augustine, mutante à la tête DUP (la méchante police liberticide qui est en charge de les capturer), la situation dégénère et la moitié de la population locale se trouve en danger de mort, avec du ciment plein le corps. Accompagné de son frère, il décide alors d’aller en ville récupérer les pouvoirs qui lui manquent pour sauver le village ! Bien sûr il y découvrira que la méchante police est très méchante et fait plein de propagande et que les bioterroristes sont bien souvent des ados paumés, comme lui. Dit comme ça, c'est vrai que l'histoire fait un peu neuneu, mais Infamous prouve qu’en terme de production, et donc de mise en scène et de qualité d’interprétation, les AAA parviennent peu à peu à se hisser à un niveau de professionnalisme proche de The Last Of Us. Si Infamous, plombé par des maladresses scénaristiques concentrées en fin de parcours, reste bien loin de la densité émotionnelle et de la qualité narrative de ce dernier, il renvoie au moins un temps les dialogues stupides au placard et rendra supportable le petit crétin que vous dirigez.



Le jeu repose en effet sur une vision contemporaine du super-héros, dont les enjeux ont été particulièrement bien cernés dans des films comme Chronicle ou Jumper. À savoir que la droiture morale qui habite habituellement les Batman, Spiderman  et consorts est remplacée par une certaine désinvolture, voir une forme d'égoïsme immature à l’égard du pouvoir acquis. La jeune génération, habituée à consommer des récits remplis de cet imaginaire fantastique, n’est pas plus surprise que ça par l’acquisition de superpouvoirs et n'a aucun scrupule à en profiter. Loin de l’adolescence de Carrie, complexée et introvertie, le nouveau super héros est arrogant et, inconscient du danger potentiel, fait de ce pouvoir une chance plutôt qu’une malédiction (ça c'est l'apanage des vieux cons). Si le joueur et le personnage passent par une phase d’apprentissage angoissante, celle-ci ne dure  donc que quelques secondes et est aussitôt remplacée par l'excitation de vivre un truc cool. Il n’empêche qu'il n'est pas pour autant à l'abri d'être dépassé par sa propre puissance et de perdre le sens des réalités, abandonnant alors toute considération morale pour en jouir pleinement. En intégrant cette question au cœur du scénario via la relation entre Delsin et son frère (qui, en tant que Shérif et aîné est quant à lui bien investi par le pouvoir de la loi et de la morale), et surtout en travaillant l'analogie de cette ivresse avec celle du joueur via le gameplay, Infamous: Second Son se révèle plus malin qu’il n’en a d’abord l’air.

Permis de tuer

Le joueur, comme souvent, a le choix entre se comporter comme un sale gosse irresponsable qui s'amuse à tuer des civils à la pelle et à tourner les autres conduits (le terme poli pour désigner les mutants) contre la population locale, ou bien se la jouer sauveur du monde. Malheureusement, c'est sur ce point que le scénario rate finalement un peu le coche. Malgré un démarrage de qualité et quelques séquences intéressantes en cours de jeu, certaines incohérences viennent largement plomber l'impression générale. Par exemple, même si le joueur massacre des innocents à tour de bras, Delsin pourra toujours compter sur le soutien de son frère. C'est d'ailleurs à peine si leur relation change, puisque les dialogues sont souvent les mêmes. Il faudra bien un jour que les développeurs prennent un parti pris narratif qui reste un tant soit peu cohérent avec leurs mécanismes de jeu s'il veulent qu'on s'y intéresse vraiment.
 
Il n'empèche que les quelques subtilités de gameplay que l’idée introduit restent assez intéressantes. Selon sa nature, les pouvoirs que le joueur obtient seront légèrement différents. Or, la qualité même de ces pouvoirs peut pousser le joueur à tuer ou l’aider à sauver des vies, épousant et influençant ainsi son inclinaison morale. Par exemple, s'il décide de tuer tout le monde, il obtient des pouvoirs létaux et il est bien plus simple alors de continuer ce joli petit massacre. La différence de fonctionnement des supers-attaques est sur ce point particulièrement éclairante. S'il est infamous, celles-ci se déclenchent bien plus fréquemment, mais il faut la charger en un court laps de temps en tuant des adversaires ou des civils. Ce système qui encourage à tuer plus vite pour tuer plus (et accessoirement nous fait atteindre plus rapidement le niveau supérieur de mauvaise réputation) est bien plus jouissif et efficace que son alternative. 

Car pour jouer au héro, il faudra prendre la peine et le temps de neutraliser les adversaires au lieu de les tuer. Ce qui rend déjà les combats plus compliqués puisque les mécanismes de neutralisation sont un peu plus complexes que ceux d'oblitération. Activer la super attaque se fait donc moins facilement, mais en contrepartie, le pouvoir se charge sur une durée illimitée tant qu’on n’accomplit aucune action répréhensible. Ça demande à être attentif, car avec tant de puissance, tuer un civil sur un malentendu est vite arrivé. Si on aurait aimé un système un peu moins permissif (vous pouvez tuer des civils à la pelle et toujours être adulé des foules), c’est une façon plutôt intéressante de lier la vocation morale du joueur au gameplay et à sa façon de jouer plutôt, que de se contenter du classique "press X to be evil".

Tuer n'est pas jouer

Indépendamment de son utilisation thématique, le gameplay reste malheureusement assez terne. La faute en partie à des pouvoirs dans le fond assez peu variés, malgré les différentes formes qu’ils peuvent prendre. Il y en a quatre en tout, dont l’un ne s'obtient qu'à la toute fin du jeu. Vraiment dommage. Ils reposent tous sur des capacités quasi-similaires : un tir normal, un missile, une capacité de déplacement et une compétence incapacitante. Il y a bien quelques variantes complémentaires, mais comme on ne peut pas passer d'un pouvoir à l’autre quand on le souhaite, n'espérez pas en profiter pleinement. Il faut en effet trouver une source élémentaire dans le décor pour pouvoir en changer. Si l’idée de devoir utiliser les éléments de l’environnement pour recharger son pouvoir est très bonne (aspirer de la fumée pour recharger smoke, quitte à détruire une voiture pour cela, ou trouver des paraboles ou des néons), elle n’est pas assez bien employée pour justifier le switch pénible que cela impose lors des combats. La plupart du temps, plutôt que de se casser la tête à trouver une source, on se cantonne donc à l'élément qui correspond à notre mode de déplacement préféré.
 
D’autant que ni les situations, ni les différents adversaires n'incitent à s'adapter. Même si les ennemis sont un poil variés, les combats se ressemblent tous. Heureusement, le jeu n’est pas non plus facile et il faut toujours rester attentif lorsqu'on passe à l'action. Mais la nature de cette difficulté est parfois elle-même source de frustration. Le système de vie et la grande mobilité de certains adversaires rendent parfois les affrontements excessivement brouillons. La vie se recharge d’elle-même lorsque vous êtes à couvert, mais sous le feu ennemi, vous êtes projeté en arrière et dans l'incapacité de tirer. Comme il n'y a aucune compétence de défense, si vous êtes pris dans un feu croisé, vous risquez fort d’y passer. La seule solution consiste alors à fuir en catastrophe avec le pouvoir de déplacement, en espérant pouvoir échapper aux adversaires les quelques secondes nécessaires à votre remise en forme. En gros, on passe pas mal de temps à courir au hasard à la recherche d'une planque. 

Autre soucis, les compétences d'attaque et la palette de mouvement ne fonctionnent pas vraiment en pleine synergie. Lorsque vous utilisez les divers boosts de déplacement, votre personnage est certes rapide, mais les patterns de ceux-ci ne sont pas très souples. Votre arsenal quant à lui n’est pas très réactif et assez primaire. Que ce soit à distance ou au corps à corps, les capacités n'ont pas vraiment été pensées pour s'imbriquer les unes aux autres. Du coup, il n’y a pas moyen d’allier votre mobilité au système de combat pour profiter pleinement de votre puissance. La méthode la plus efficace étant parfois de rester caché derrière un mur et d’éliminer les ennemis un par un. Bien sûr, vous rencontrerez aussi votre lot de combats épiques et jouissifs dont vous sortirez victorieux d'un cheveux, mais dès que le nombre d'adversaire augmente, le manque de lisibilité nuit souvent au plaisir de jeu.

Same old routine

Ne comptez pas sur la variété des missions pour rehausser le piquant des situations de combat. La progression est clairement l’un des points faibles du jeu. Déjà assez court, il faudra en plus invariablement en passer par les mêmes séquences : d'abord chercher et poursuivre l’un des trois bioterroristes évadés, puis récupérer son pouvoir avant de récolter les compétences associées une par une, et enfin exécuter la mission du bioterroriste en question avant de recommencer pour le suivant. C’est plus sans surprise que redondant. Même les boss ont du mal à apporter de la variété puisqu'ils ne sont pas terriblement amusants et bien plus facile à vaincre qu'une grosse troupe de DUP. Mais c'est surtout la phase de récupération des compétences qui est particulièrement pénible, puisque vous perdez alors temporairement tous vos autres pouvoirs pour apprendre les nouveaux un à un. Au final, on a un peu l’impression de jouer à trois gros tutoriaux sur un quart du jeu.
 
Comme dans tous les open worlds, vous pourrez bien sûr faire la chasse aux objets pour augmenter vos pouvoirs via un arbre d'amélioration. Il y a également quelques activités secondaires pas palpitantes à réaliser. Au moins, Sucker Punch ne tire pas trop sur la corde à ce niveau et on a rapidement fait le tour du sujet. Trouver une caméra cachée, un agent infiltré ou un dossier secret, ne vous prendra en général qu’une ou deux minutes. Mis à part les missions de dossiers secrets - qui tombent d’ailleurs complétement à plat - ces activités n’ont pas vraiment de lien avec la mission principale, mais permettent par contre de libérer les zones de la présence du DUP.

Dernier tour avant inventaire.

Pour finir, faisons un petit commentaire sur la partie technique. Le jeu est bien foutu, les effets des pouvoirs lors des combats sont un régal et le travail effectué sur les personnages et leur animation est de haute volée. Par contre, la ville en elle-même n’est vraiment pas très variée ni très grande. Même si on passe plus de temps sur les toits que dans la rue, on finit par remarquer les similitudes grossières plutôt que les différences entre les quartiers. Comme c'est toujours le même type d'architecture et d'environnement (grosso modo, de gros immeubles partout avec des sources pour tous les pouvoirs), il n'y a rien qui vous oblige à vous adapter au terrain de jeu. Le fait de ne pas pouvoir nager ou marcher sur l'eau (après tout, on est le second son) est aussi très pénible pour l'exploration, d'autant que celle-ci sert plus de mur invisible que d'enjeu de déplacement. La composante open world du jeu n’est donc pas vraiment ce qui convainc le plus, ni en terme de gameplay, ni techniquement. On a un peu l'impression que ça a été un moyen pratique de faire l'économie d'un level design plus intéressant, qui obligerait par exemple le joueur à jongler entre ses pouvoirs ou à exploiter au mieux différents types de terrain.



Autre remarque également, le jeu est court (moins de dix heures pour en faire le tour complet) et on en voit arriver la fin très vite en se concentrant sur l'histoire. Ce n’est pas forcément une mauvaise décision vu qu’il n’a pas vraiment grand-chose de plus à offrir passée cette dizaine d'heures. Vous pouvez toujours recommencer en changeant de style, mais les différences ne vont pas non plus vous sauter aux yeux. On peut cependant saluer le travail de suivi de Sucker Punch impeccable sur ce coup-là. S’ils promettent plus, ils ont déjà ajouté gratuitement une mission annexe avec une composante ARG presque plus intéressante que toutes celles du jeu, ainsi que du contenu endgame pour les acharnés qui voudraient vraiment continuer à tuer des agents DUP jusqu’à la fin de leurs jours. On n'en voit pas l'intérêt mais c'est gentil quand même.
Infamous n’est pas un excellent jeu, mais si vous aimez le genre, il reste tout à fait recommandable. Il ne transcendera personne par son originalité ou sa durée de vie, ni par la qualité de son gameplay, mais quelques bonnes idées et une qualité de production à la hauteur de la next-gen en font une expérience sympathique et solide à défaut d’être inoubliable.
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