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IndieCade Paris 2016 : les confs

Fougère & FrereT0c par Fougère & FrereT0c,  email
Chauvinisme oblige, nous avons été particulièrement attentifs aux conférences données par des français. Coup de bol, nous étions bien représentés, avec Frédéric Coispeau et Michel Ancel. Voici un résumé de ce que vous avez loupé.

Frédéric Coispeau

Il est 14h. Après un repas frugal mais réparateur constitué d’un sandwich thon/olive, Fougère et moi nous nous dirigeons vers le minuscule amphithéâtre où Frédéric Coispeau va commencer sa conférence. Les relents de vieux bestiaux agressent déjà nos sens, un exploit vu l’heure, mais n’écoutant que notre courage nous prenons place. La conférence est sobrement intitulée “Du chômage au succès indépendant”, et là nos sens de journalistes sont déjà en alerte : “Pôle Emploi, un incubateur menant au succès ?! Impossible !”.

Frédéric commence par raconter ses débuts, ses études en game design, son passage chez Lexis pour travailler sur Alt Minds, son emploi chez Ubisoft (quelle surprise) où il travaille sur Just Dance. Puis en 2013, le chômage. Commence alors une course contre la montre avant que l’URSSAF ne finance plus le projet. Frédéric souhaite créer son jeu tant qu’il a du temps, mais seul c’est compliqué. Il trouve Alexandre Muttoni qui passait par là, graphiste de son état. Vient alors le moment de trouver quoi faire. Dès le début le projet s’oriente vers la création d’un beat’em’up crado avec un univers à la Hotline Miami, la référence citée pour la partie baston étant évidemment Streets of Rage. Sauf que faire un chouette design et des règles cool ça ne fait pas tout, il leur faut un développeur.
 

C’est là que la première galère arrive. Malgré moultes annonces, demander aux copains… le message a du mal à passer et trouver un développeur relève de la gageure. C’est grâce à une page Facebook que Florian Reneau entend parler du jeu et se greffe au projet. Après 2 mois de développement, le prototype comprenant le premier niveau est au point et il faut trouver un nom. Ce sera Necro, du nom de la drogue utilisée dans le scénario du jeu. Sauf qu’un de leur pote expert en communication, qui passait lui aussi par là, passe la tête dans l’encadrement de la porte et leur dit “Ouais non les mecs, ce nom il marchera jamais. Vous pensez quoi de Mother Russia Bleeds ?”. Le nom évoque bien le contexte du jeu et surtout, il parlera aux populations de l’Est qui sont de gros consommateurs de beat’em’up ce qui sera un gros plus lors de la communication. Peu après, le studio Le Cartel voit le jour.

Nous sommes en février 2014, le jeu avance bien et Vincent Cassar du groupe Fixions rejoint la petite équipe pour bosser sur la musique. Au bout de 6 mois, le premier prototype jouable avec de la musique est prêt. Comme Mother Russia Bleeds fait indéniablement vibrer la corde rétro et qu’il est venu le temps de communiquer, Le Cartel décide de présenter son jeu aux Retrogaming Days IV en mars 2014. Le jeu est très bien reçu et cela leur permet d’avoir les premiers retours du public sur leur boulot.
 
Puis tout s’enchaîne. Le 30 avril 2014, les développeurs mettent en ligne le premier teaser du jeu sur Youtube. Mother Russia Bleeds est sur toutes les lèvres, l’effet buzz fonctionne. C’est à ce moment qu’un mail de Devolver Digital va tout changer. Un mail qui demande “Coucou, on passe quand ?”. Grosse pression, l’enjeu est énorme. Si Le Cartel parvient à convaincre Devolver, il pourront terminer leur jeu et réussir à le vendre. Il leur faut donc présenter une démo qui envoie du poulet et préparer un speech qui explique les ambitions du jeu. Après un suspense digne des plus grands moments de l’émission Miss France, ça fonctionne et Devolver accepte de financer le projet. Autant dire que c’est déjà une énorme victoire pour cette équipe de 3 larrons qui travaille d’arrache-pied depuis tout ce temps. En janvier 2015, ils montent leur société en faisant vérifier leur contrat par un avocat. Car oui, même si c’est Devolver, les développeurs peuvent encore se faire enfler en ne lisant pas les petites lignes police 0,5 sur un contrat avec un éditeur.



Arrive le temps de l’E3. Et comme Devolver ne fait rien comme les autres, ils louent le parking en face du Convention Center pour y installer des caravanes et présenter leur line-up. Gros succès encore une fois pour Mother Russia Bleeds qui attire énormément la presse. Le pic du passage de Le Cartel à Los Angeles sera toutefois atteint lors de la conférence de Sony où le jeu est montré par Devolver sur les écrans géants qui repeignent la salle en rouge.

Fin 2015, des soucis personnels dans l’équipe ralentissent énormément le projet mais Frédéric Coispeau indique que Devolver s’est montré très compréhensif et leur a dit : “Si vous n’êtes pas bien, vous ne ferez pas un bon jeu. Prenez votre temps”. Comme quoi, même les grosses structures ont parfois une âme. En mars 2016, les développeurs donnent le dernier coup de collier et peaufinent le sound design. C’est toutefois en août que le plus gros ennui montre son nez. Le studio obtient une info comme quoi pour rajouter du multijoueur en ligne, il faudra tout recoder. Pas le temps pour ça, le jeu doit sortir et c’est donc en septembre que Mother Russia Bleeds est disponible sur PC. La réception critique est plutôt bonne, et les ventes pas mauvaises. Mais dans le cas d’un contrat avec un éditeur, ce dernier doit d’abord se rembourser avant de verser quoique ce soit aux développeurs. Le Cartel est toujours en attente, mais avec le lancement prochain du jeu sur PS4, ils sont plutôt confiants. Voilà donc l’histoire de Mother Russia Bleeds, un jeu financé en partie par Pôle Emploi, et donc vous. Il n’y a pas que Kickstarter dans la vie.

Michel Ancel

Après avoir entendu l’expérience de vie d’un « jeune » dèv indépendant français, nous sommes allez écouter ce qu’avait à nous dire un des « vieux » de l’industrie en France, Michel Ancel. Le monsieur a pas mal roulé sa bosse, et après avoir travaillé sur de gros projets, il est revenu à la création d’univers en petite équipe.

La conférence portait sur le parcours du monsieur en tant que créateur de jeux. Au delà des jeux qu’il a créé et de la marque qu’il a laissée, Michel Ancel aborde ici ses différentes expériences dans la réalisation de jeux vidéo, et des différentes leçons qu’il a pu en tirer.

1988
Sa carrière commence cette année-là (à 12 ans près), avec la Coleco Vision. Il remarque un jour par hasard un problème avec la console : lorsque l'on fait un faux contact avec la touche marche/arrêt, les jeux bug à cause de secteurs mémoires persistants après le « redémarrage » de la machine. Une envie de bidouiller avec les jeux vidéo le saisit, et ne le quittera plus. Il se lance alors dans la réalisation de son premier jeu, Mechanical Warrior sur Atari ST. Le jeu voulait être orienté arcade, avec une dimension stratégique, notamment en permettant de construire des personnages avec des pièces lootées pendant les parties. L’arrière-grand-père de The Surge en somme. Le résultat final est loin de ses ambitions, et le jeu se résumera à un shoot’em up où on tue des brosses à dents (il assume ses propos au point de nous montrer un screenshot de la bête)

1991
Il crée un jeu solo où il est à la fois programmeur et artiste, Brain Blaster by Michel Ancel, et est publié par Ubisoft. C’est la mode des jeux associés à un « auteur », comme Sid Meier et la saga Civilisation, mais ça ne fonctionnera pas avec lui. Vu la suite, on peut dire que le bonhomme n’avait pas besoin de ça.

1992
L’année de la création de Rayman. Travaillant en ermite comme à son habitude, il travaille sur le design de son prochain personnage. L’animation des bras et des jambes lui pose problème, et il décide que plutôt que le résoudre, il va simplement l’éliminer. Il décide de partir sur un design sans membres, et se sert de son expérience de programmeur pour créer un petit outil lui permettant d’animer un personnage privé de bras, jambes et nuque. Rayman est né.



2011
Entre Rayman et l’Ubi Art, il bosse sur 2-3 jeux sans importance : Beyong good and evil, sa suite, et King Kong. Du premier, il garde le souvenir d’un moteur très simple d’utilisation et agréable à utiliser. Il commence à travailler sur sa suite en 2008, et fait beaucoup de recherches sur la génération de planètes entières, avec ce que ça inclu de villes cosmopolites et d'environnements naturels variés. Le projet devient trop gros, trop ambitieux, les performances sur les machines de l’époque sont catastrophiques, le projet est mis en hibernation jusqu’à un futur plus radieux (C’EST MAINTENANT MON GARS). King Kong, enfin, est le projet qui s’éloigne le plus de ce qu’il recherche dans le jeu vidéo. Une équipe immense, la réalisation entravée par les process et l’impossibilité de pouvoir modifier le jeu à la volée.
2011, donc. L’année de l’Ubi Art. Créé par une toute petite équipe, et centré à la base sur de la déformation d’image, le moteur rend à Michel Ancel et son équipe le plaisir simple de faire des jeux. Comme le dit lui-même le monsieur « On est des artistes finalement ». L’équipe s’éclate à prototyper des tonnes de jeux très rapidement avec leur nouvel outil, et il est persuadé que ce genre d’expérience simplifiera grandement la réalisation de projet plus ambitieux et conséquents.

2014
Pendant que Knife Party sortait son morceau Micropénis, Michel Ancel commençait à bosser sur Wild. Cette fois-ci, il décide de s’affranchir des carcans que se traînent tous les projets de jeux vidéo, et plus généralement les projets informatiques, depuis que Pong existe : la multiplication de tâches redondantes. Plutôt que d’aller voir un programmeur pour lui expliquer la vision qu’il veut réaliser, et y passer parfois beaucoup de temps pour un résultat pas toujours satisfaisant, il décide de se replonger dans la technique en bossant sur 3DSMAX, notamment les scripts que le logiciel permet de réaliser.

2016
Sa période de R&D lui permet d’accoucher d’une nouvelle méthode de création d’environnement, où les humains ne sont pas obligés de se taper tout le boulot à la main. Le principe est le suivant : Il crée une map grossière, avec des gros pixels, d’un environnement. Les différentes couleurs de pixels vont représenter des arbres, des rivières, des montages, etc. Une fois cette ébauche de map réalisée, il la file à un petit programme qui va extrapoler l’environnement désiré à partir des informations et des assets disponibles. 15 minutes plus tard, TADAAAA ! Une zone de jeu toute neuve, variée avec plein de détails, sans qu’une personne n'ait dû passer des heures à la réaliser (et ne pas avoir des collaborateurs névrotiques, c’est un vrai plus d’après lui). En sachant qu’il a réalisé le premier prototype de cet outil après 2 jours à avoir geeké chez lui, c’est assez impressionnant (là aussi, il appuyait ses dires avec de jolis screenshots).


 
Voilà qui conclut notre résumé de l'Indiecade en tant que salon. Au délà de l'aspect pédagogique de l'initiative, il est bon de constater que les développeurs sont nombreux à faire l'effort de parler de leurs expériences et méthodes de travail. On sent que tous sont animés par la même passion, et qu'ils sont prêt à en discuter des heures durant si on leur en laisse l'occasion. A venir, nos previews des jeux qui nous ont beaucoup plu.
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